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d’autres mines, à Gould-and-Curry par exemple, les immenses nids de minerai d’argent sulfuré qu’on rencontra dans le principe portèrent les actions de cette compagnie aux taux prodigieux que nous avons signalés.

Le mode d’exploitation adopté dans les mines de Virginia-City satisferait l’administration la plus méticuleuse. On attaque le terrain par des puits qui recoupent en profondeur le filon. A divers niveaux, des galeries transversales se détachent de ces puits et rejoignent le gîte métallifère. On ouvre, perpendiculairement à celles-ci, d’autres galeries sur la direction du gîte; on abat, on extrait le minerai entre deux niveaux au moyen de cheminées ou couloirs allant d’un étage à l’autre, et divisant le gîte en carrés. On procède à peu près comme dans l’exploitation d’une forêt, d’un taillis; seulement ici la matière utile, une fois arrachée, ne se reproduit plus. On remblaie soigneusement, avec des roches stériles, la place qu’occupait le filon. Il importe en effet de ne pas laisser de vides et de s’opposer autant que possible aux mouvemens, au tassement du terrain excavé. Les travaux sont partout conduits suivant les règles les plus sévères de l’art des mines : des pompes gigantesques extraient les eaux des profondeurs, des ventilateurs soufflent l’air respirable jusque dans les chantiers les plus éloignés, et tous les moyens de sûreté sont mis en usage pour protéger le mieux possible la vie et la santé des ouvriers. Il y a même partout un déploiement de luxe qui étonne au premier abord l’ingénieur européen. Les appareils les plus nouveaux, les plus ingénieux, ont été adoptés pour l’entrée et la sortie des ouvriers, pour l’extraction des minerais, pour l’épuisement des eaux. Les galeries, solidement et abondamment étayées, sont toutes munies de chemins de fer parcourus par des wagonnets. Presque partout des machines à vapeur sont installées, à l’orifice des puits et même dans les souterrains, pour mettre en mouvement les divers appareils de la mine : pompes, ventilateurs, cages d’extraction[1]. A la tête des travaux est un directeur, manager ou super-intendent, qui réside sur les lieux; il est aidé d’un secrétaire, d’un comptable ou treasurer et de divers commis. Les ouvriers sont divisés en deux escouades, celle du dedans et celle du dehors; aux premiers incombent toutes les opérations souterraines : le percement de la roche, le fonçage des galeries, l’abatage et le triage du minerai, la mise de celui-ci en wagonnets, etc.; les seconds sont surtout occupés de la conduite des machines extérieures, ils reçoivent le minerai à l’orifice des puits et le transportent aux usines.

  1. On a eu le tort, dans quelques mines, d’établir des chaudières à l’intérieur. Comme les étais ou boisages y sont très abondans, il en est résulté, notamment en 1869 et 1870, des incendies terribles qui ont mis en péril la vie des hommes, la solidité et la durée des travaux.