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lumineuses de la politique conservatrice qu’il a si noblement et si hardiment pratiquée. A quels signes la reconnaît-on tout d’abord ? Au culte de la loi, à l’appel incessant qu’il adressait à la force morale qui en résulte, comme aux mœurs publiques qui peuvent la doubler. De quel accent ferme et convaincu Casimir Perier ne dit-il pas en effet à la France : « Il faut apprendre aux peuples qui prétendent à l’honneur d’être libres que la liberté, c’est le despotisme de la loi ! » — « Il faut respecter les lois, puiser dans l’ordre légal et dans la force morale qui en découle tous les moyens d’action et d’influence. » — « C’est aux mœurs publiques de venir aussi pour leur part au secours des lois contre la domination des partis. » Puis, s’adressant aux passions réactionnaires, auxquelles se mêlaient celles d’un grand nombre de ses propres amis, il ajoute : « Jaloux d’accueillir toujours d’utiles avertissemens, le gouvernement ne l’est pas moins de repousser les obsessions passionnées de ceux qui chercheraient à l’entraîner hors de la ligne de l’ordre légal. » — Il n’y a que les gouvernemens faibles qui recourent aux moyens exceptionnels. » — « Toutes les fois que vous nous confierez l’arbitraire, nous ne voudrons pas en profiter. » Il avait surtout pour adversaire, dans cette lutte soutenue en faveur du droit commun, la terreur qui agitait les esprits, faisait prédire un cataclysme à beaucoup d’imaginations affolées, et appelait l’arbitraire à son aide ; mais il insiste sur son éloignement pour toute loi d’exception et pour ces dangereuses suggestions de la terreur panique avec d’autant plus de force « qu’il était plus résolu à ne jamais devenir un gouvernement de parti. » Il le proclama dès les premiers temps de sa présidence, et telle était l’ardeur de sa conviction, qu’un jour, succédant à M. Mauguin, qui venait d’achever un de ses plus violens discours, il s’écriait, en se tournant vers l’opposition : « Nous ne sommes en guerre ni avec la France ni avec vous ! » Une année après, il répétait : « Le gouvernement se fait un devoir d’être impartial envers tout le monde et de n’épouser les passions d’aucun parti… La nation n’est pas un parti, et nous sommes ici les représentans de la nation. »

Aussi, en songeant aux calomnies, aux violences, aux désordres qui s’accumulaient sur les pas de Casimir Perier, avec quelle admiration ne faut-il pas recueillir les paroles qui vont suivre, paroles d’une modération si impassible, d’une morale si élevée, on peut même ajouter d’une habileté si efficace dans leur grandeur ! « Sachons nous honorer même en nous divisant, et résistons à ce besoin de haïr et de soupçonner qui envenime tout et qui dégrade calomnieusement jusqu’aux plus nobles caractères, jusqu’aux plus pures renommées. » — « Ne cédons jamais au plaisir d’écraser les