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naturel de mal faire, trient en couches tellement épaisses que les diamans sont enfouis, au milieu des autres matériaux et échappent à la vue. Pour donner une idée de la négligence avec laquelle ces hommes s’acquittent de ce devoir, je dirai qu’un de mes associés, étonné de voir que nos trois claims réunis, travaillés ensemble par tous nos Cafres, nous donnaient à peine huit ou dix diamans par jour quand nous pouvions en attendre vingt-cinq ou trente, puisque chacun de nos claims fournissait une moyenne d’environ huit diamans chaque jour quand nous les travaillions nous-mêmes, eut l’idée de cacher parmi les terres qui se trouvaient sur la table, un diamant de 36 carats, c’est-à-dire plus gros que la plus belle noisette, afin de voir s’il fallait accuser la fidélité des ouvriers, et, quoiqu’il les surveillât attentivement, toute la terre fut triée devant lui sans que le diamant fût aperçu ; il avait été rejeté sous la tabule, où il fut retrouvé après des recherches. Cette même négligence nous fut confirmée du reste dans une autre circonstance : en déplaçant la table pour la transporter dans un endroit moins encombré, on trouva, parmi les sables qui avaient été triés, un diamant de 13 carats 1/2 gros comme la première phalange du doigt et qui aurait été perdu pour nous comme tant d’autres. C’est même devenu une industrie nouvelle aux mines, pour ceux qui ne peuvent acheter un claim, de repasser les terres abandonnées, ce qui est quelquefois très productif. Un de mes amis se faisait ainsi, sans avoir risqué aucun capital, un revenu de 250 francs par semaine, car, outre les diamans qui peuvent échapper à la vue pendant le triage, il s’en rencontre dans les coraux, et les terres dures qui, restent dans le premier tamis, et ces terres, après avoir, été exposées quelque temps à la pluie et au soleil, se désagrègent d’elles-mêmes et abandonnent leur trésor à celui qui a eu la patience de chercher et d’attendre. Beaucoup d’enfans et de jeunes Hollandaises passent ainsi leurs journées à fouiller à l’aventure dans les sables, et sont quelquefois largement récompensés. Dans la rue où je travaillais, un enfant trouva, parmi des terres déjà triées, un diamant de 73 carats. Quoique des hasards aussi favorables soient une exception, il n’est point rare de rencontrer dans les rues de petits diamans d’un carat et au-dessous, tombés avec la terre pendant le transport, qui s’effectue dans des charrettes à peine jointes, ou provenant des sables dont on se sert comme de gravier dans les tentes et ailleurs.

Les hommes et les femmes ne sont pas seuls à se montrer avides de ces cristaux précieux, ils ont des concurrens parmi les volailles, qui, pour un motif plus matériel, avalent les diamans, comme les autres cailloux, quand elles les rencontrent. Aussi les cuisiniers qui ont à préparer un poulet ne manquent-ils jamais d’apporter les