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sultan consentit enfin à conclure un traité qui garantissait la liberté du commerce et la protection réciproque aux sujets des deux nations, annulait les griefs mutuels des années précédentes, et proscrivait absolument la traite, la piraterie, le vol d’épaves, etc. Ce traité, du côté d’Atchin, resta une lettre morte. Deux navires sous pavillon hollandais furent confisqués en 1861 par un rajah atchinois, sous un prétexte des plus futiles, avec l’assentiment du sultan. En vain le gouvernement colonial multiplia ses réclamations, il ne put rien obtenir. En revanche, le sultan d’Atchin fit de son mieux pour s’opposer à la consolidation de la suzeraineté hollandaise dans le pays limitrophe de Siak, sur lequel il invoquait des droits depuis longtemps périmés. Le poste hollandais de Batou-Bara fut attaqué par ses gens, et de nouveau la piraterie recommença sur la côte orientale. En vérité, la patience néerlandaise ressemblait fort à de la faiblesse. Des Chinois de Penang, par conséquent sous la protection britannique, furent assassinés à Tamiang, district de la côte est et faisant partie des territoires revendiqués par le sultan. Assahan et Serdang, sur la même côte, s’insurgèrent à l’instigation d’Atchin contre la Néerlande, et il fallut une expédition pour les faire rentrer dans l’ordre. Il en fallut deux pour écraser le repaire de forbans et de capteurs d’esclaves qui s’étaient de nouveau fortifiés dans l’île de Nias. Il en fallut une quatrième en 1865 pour venir à bout d’un partisan atchinois qui avait réussi à se retrancher dans le district de Singkel, avec l’intention de le rendre de nouveau tributaire du sultan.

Nous passons rapidement sur ces détails, qui ne faisaient qu’accentuer ce qu’il y avait de faux dans la position réciproque de la Hollande et du royaume d’Atchin. A la fin, les puissances maritimes auraient eu le droit de se demander si l’intérêt impérieux de la sécurité des mers devait toujours être subordonné aux difficultés résultant d’un traité qui ne liait que l’Angleterre et les Pays-Bas. Ceux-ci pouvaient-ils s’exposer indéfiniment à ce que la France ou l’Italie, ou les États-Unis, sans parler d’autres états, se résolussent à châtier les insultes faites à leur pavillon et peut-être à s’établir au nord de Sumatra? Les sympathies de la colonie anglaise de Malacca pour l’indépendance d’Atchin avaient elles-mêmes, sous la pression des intérêts et des faits, donné place à de tout autres sentimens. En 1868, le gouverneur anglais avait dû lancer une proclamation pour avertir les navigateurs européens des dangers que l’on courait en allant trafiquer sur les côtes atchinoises. Bientôt les journaux anglais de la presqu’île de Malacca, le Penang Gazette, le Straits Observer, retentirent des doléances du commerce local, qui se voyait privé de toute sécurité sur les côtes de Sumatra, et sommèrent, pour ainsi dire, les Hollandais de faire rentrer dans l’ordre