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complaire dans cette étude pleine d’intérêt; elle charme l’esprit, elle inspire des vues générales, elle apporte à la psychologie des élémens indispensables. L’homme et les animaux possèdent les mêmes sens, et seul le degré de perfection diffère; c’est assez pour rendre certaine l’analogie d’une foule d’impressions. La crainte, la joie, le plaisir, se manifestent chez une infinité de créatures. La mémoire d’un mammifère ou d’un oiseau est souvent remarquable au point d’étonner, l’affection d’un animal pour son semblable ou pour des personnes assez forte pour être touchante. Les exemples de curiosité ne sont pas rares; la propension à l’imitation est proverbiale pour les singes et les perroquets. L’aptitude à recevoir une éducation est très frappante chez beaucoup de mammifères et d’oiseaux; à cet égard, le chien émerveille son maître, le singe captif mange la soupe avec une cuiller et casse les noix avec une pierre. Le sentiment maternel est poussé jusqu’à l’extrême violence parmi les êtres habiles à soigner leur progéniture. Le discernement éclate chez la bête qui construit un nid; l’oiseau et l’insecte choisissent l’endroit le plus propice, démêlent les matériaux convenables au milieu d’objets inutiles, parent aux accidens qui surviennent, veillent au danger, et parfois profitant d’une occasion heureuse, comme la rencontre, d’un nid abandonné, ils raccommodent le vieil édifice; la fatigue d’un long travail sera épargnée. De nombreux observateurs ont noté de la part des animaux des actes qui attestent l’intelligence; dans plusieurs de nos ouvrages, nous avons sur ce sujet rapporté des faits saisissans, et M. Darwin a pris la peine de recueillir une série d’anecdotes.

Les facultés de l’ordre intellectuel, étant de même essence chez l’homme et les animaux, indiquent-elles donc une communauté d’origine? Assurément pas plus que les ressemblances de l’organisme. Avec le caractère d’unité générale que présentent les phénomènes, — celui de la vie dominant tous les autres, — la diversité est bien de ce monde. Chaque type, chaque espèce a dans ses aptitudes, comme dans son organisation, des particularités ineffaçables qui se transmettent de génération en génération. Un moment, vaincu par l’évidence. M. Darwin écrit au sujet des facultés intellectuelles de l’homme et des animaux : «Sans doute, à cet égard, la différence est énorme, même si nous comparons l’un des sauvages le plus dégradés, qui n’a pas de mots pour exprimer un nombre supérieur à quatre, et qui n’emploie aucun terme abstrait pour les objets et les affections les plus ordinaires, avec le singe le mieux organisé. » La comparaison très parfaite de plusieurs animaux d’espèces bien distinctes conduit inévitablement à une conclusion analogue ; même si les rapports sont nombreux, la différence demeure évidente en quelques points.