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LES RÉVOLUTIONS
DE L’ASIE CENTRALE

IV.[1]
LES CONQUÊTES DE LA RUSSIE


I.

D’après la façon dont on écrit d’habitude l’histoire de l’Europe au moyen âge, il semblerait que les nations occidentales aient vécu isolées du reste du monde, qu’elles se soient suffi à elles-mêmes et qu’elles aient à peine ressenti le contre-coup des grands événemens de l’Asie centrale. Il n’en est pas ainsi. Les croisades ne sont pas seulement un accès passager de ferveur religieuse. Après saint Louis, tous rapports n’ont pas été rompus entre Européens et Asiatiques. Si la France, l’Italie, l’Espagne et l’Angleterre dirigèrent dès lors leur activité vers les pays d’outre-mer que l’on venait de découvrir, les états slaves au contraire restèrent en relations suivies avec les populations de l’Orient. Voyez la Russie notamment. À la fin du XIVe siècle, il existe déjà un état moscovite, mais ses princes sont vassaux du khan des Kiptchaks, le descendant de Djozdi, l’un des trois héritiers de Gengis-Khan. Les Kiptchaks, qui formaient la Horde-d’Or, étaient les moins civilisés des Mongols ; plus fidèles que leurs frères de la Transoxiane aux habitudes nomades de la race touranienne, ils avaient conservé la rudesse de leur caractère primitif, et, bien que convertis de nom au mahométisme, ils étaient encore adonnés à des superstitions grossières. Sur

  1. Voyez la Revue du 15 mai.