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Il fallait donc se tenir en garde contre tous leurs systèmes. Finalement il n’y avait en tout ceci à considérer qu’une question de « dignité » pour les souverains, et partant de ]h il fallait laisser les poursuites dans le domaine de la diplomatie. Il n’y avait donc rien à faire, l’exemple du passé devant être regardé comme la meilleure règle du présent et de l’avenir. Le procureur-général Merlin voyait autrement les choses et les voyait mieux. Il convenait, selon lui, de sortir des incertitudes sur des questions de cette importance, mais le terrain fuyait sous les pas ; pour lui donner quelque consistance, il était indispensable « de faire adopter par tous les gouvernemens des règles fixes et uniformes. »

Ainsi dès cette époque l’étude seule de la condition des agens diplomatiques conduisait fatalement à la solution que proposent aujourd’hui les parlemens d’Italie et de la Grande-Bretagne ; mais l’heure était mal choisie pour jeter les bases d’un code international d’accord avec les autres puissances ; le projet rentra, pour n’en jamais sortir, dans les cartons du conseil d’état. En attendant mieux, Merlin voulut du moins utiliser ses recherches. Il fit donc entrer dans son recueil les élémens de son remarquable mémoire, un peu trop persillé par M. d’Hauterive, et c’est sur ce fond, rajeuni par les travaux de Martens, que vivent encore nos tribunaux, et l’on peut ajouter les tribunaux de l’Europe, quand il s’agit de trancher une question de droit des gens[1]. Il a bien été conclu quelques traités avec certaines puissances, on a bien dit dans ces traités que les agens diplomatiques jouiraient respectivement, dans les deux pays, « des avantages de toute sorte, accordés ou qui pourraient être accordés à ceux de la nation la plus favorisée ; » mais ces avantages n’ont été définis, que nous sachions, dans aucun traité antérieur auquel les jurisconsultes et les tribunaux puissent recourir. Parfois même on a pris l’engagement, comme dans le traité intervenu entre la France et la Toscane en 1853, de régler les attributions, privilèges et immunités des agens respectifs « et d’en faire l’objet d’une convention spéciale dans le plus bref délai possible ; » mais il ne semble pas qu’aucune convention de ce genre ait encore été arrêtée. Chacun pour soi, chacun chez soi, telle est en définitive la maxime qui jusqu’à ce jour a gouverné les peuples.


III.

La codification des lois internationales et la constitution de l’arbitrage ouvrent un si vaste champ aux négociations attendues des bons offices de la diplomatie, que le programme sera réduit, on doit

  1. Voyez, dans le Répertoire de Merlin, le mot ministre public.