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LES
SCIENCES GÉOGRAPHIQUES
EN FRANCE ET A L’ÉTRANGER


I.

« Le bien ne fait pas de bruit ; le bruit ne fait pas de bien. » Cette parole célèbre, vraie pour la politique et la morale, l’est surtout pour la science, dont l’œuvre patiente et réfléchie réclame cette liberté d’esprit, cette possession de soi-même, si nécessaires au travailleur. L’empressement des gens impatiens de se produire ne vaut rien pour cette lente besogne : ils en compromettent le succès, et, s’ils obtiennent facilement la notoriété dont ils paraissent avides, ils ne sauraient prétendre à la solide renommée réservée au labeur consciencieux. On a tant répété depuis les douloureux événemens de 1870 que personne en France ne savait la géographie, on a tant dit que nos officiers, que nos généraux surtout étaient à peine renseignés sur leur propre pays et sur les frontières mêmes où nos premiers revers avaient transporté le théâtre de la guerre, que beaucoup de ces gens pressés, de ces ouvriers de la première heure, jugèrent opportun, fructueux peut-être, de s’improviser géographes. La liste de la Société de géographie de Paris, qui ne comptait que 580 membres au 31 décembre 1869, en montre avec orgueil plus de 1,000 aujourd’hui. La guerre n’était pas encore terminée qu’on s’était déjà mis en devoir de rédiger au pas de course des programmes d’enseignement, sans même avoir pris le soin de discuter et de fixer les principes essentiels d’une bonne méthode. On se piqua surtout de célérité en livrant à un public moins facile à contenter