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l’importance du sceau, mais cela ne le faisait pas absolument disparaître. Ce qui en amène la désuétude, c’est l’emploi du timbre, de l’estampille, de ces en-tête imprimés qui disent déjà sur le papier une partie de ce que le sceau pourrait exprimer. Sans doute le grand sceau royal subsiste en France jusqu’au XVIIIe siècle, et on le retrouve alors à peu près tel qu’il était sous les derniers Valois avec le type de majesté. La légende, encore écrite en latin pendant le règne de Henri IV, est rédigée en français à partir de Louis XIII ; mais la cire n’offre plus une consistance qui en assure la durée ; elle est si molle que les emblèmes représentés à la fin du XVIIIe siècle ne nous sont arrivés que déformés, et l’on peut à peine signaler un type de cette époque dont les reliefs soient demeurés intacts. Les particuliers n’ont plus guère que des cachets sur lesquels les nobles et soi-disant nobles font figurer leurs armoiries. La façon même dont on appose ces cachets se prête moins à la conservation de l’empreinte. Dès la première moitié du XVIIe siècle, le fil de soie qui fermait la lettre disparaît, et le cachet est appliqué directement sur le repli. Les sceaux de l’assemblée nationale et de la république n’ont plus de contre-sceaux. Si parfois on empreint encore les sceaux sur la cire ardente, plus ordinairement ils sont appliqués en timbres humides ; autrement dit, ce ne sont plus les sceaux véritables tels que les entend la sigillographie. Le sceau qui porte l’inscription : la nation, la loi et le roi, sur un écusson surmonté d’un bonnet phrygien, et que l’assemblée nationale fit graver par Mauriset, fut simplement apposé sur les actes au moyen d’un pain à cacheter recouvert d’une languette de papier sur laquelle on obtenait l’empreinte en usant d’une forte pression. Le sceau de la convention est simplement imprimé sur le papier, comme celui de l’assemblée législative. Les pièces émanées du conseil des anciens, des cinq-cents, du tribunat, du corps législatif, du sénat et des corps judiciaires, ne reçoivent plus que l’empreinte d’un timbre. Le sceau en réalité n’existe plus. La vieille iconographie sigillographique a fait place, d’un autre côté, avec son épigraphie, à tout un ensemble d’emblèmes, de devises, de vignettes, dont le caractère dénote un changement complet d’idées, symbolique révolutionnaire dont l’histoire aurait son intérêt, à en juger par ce que nous en dit M. Ed. Dupont dans la notice qui précède la description des pièces postérieures à 1780 exposées au musée des Archives[1]. Les emblèmes politiques et philosophiques tendent eux-mêmes de nos jours à disparaître. L’image, dans nos mœurs administratives, fait de plus en plus place au simple énoncé, au titre officiel écrit à la main ou

  1. Voyez Musée des Archives nationales, documens originaux de l’histoire de France, Paris 1872, in-4o.