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Derroja surveillait la route de Ghâtillon ; la brigade Lamariouse campait à Meudon, observant la vallée de Sèvres. A Sèvres même se trouvait un régiment de gendarmerie sous le colonel Gremelin. Le Mont-Valérien couvrait le reste de la ligne. L’intérieur de Versailles était sous la garde de la division Bruat, nouvellement arrivée et composée en partie de solides régimens de marins. La brigade Daudel restait comme réserve dans le parc.

Tout était prévu pour la défense, en même temps qu’on s’occupait d’appeler des renforts et de refaire les troupes, de les relever à leurs propres yeux. Avec des soins, un peu de bien-être et la discipline de la vie de camp, l’armée commençait à se reconstituer, à reprendre une certaine confiance, de sorte que le jour où l’insurrection se décidait à devenir agressive, la situation avait singulièrement changé. On pouvait attendre l’attaque, et au besoin aller au-devant d’elle.

Premier choc, le 2 avril. Les bataillons parisiens étaient sortis par le pont de Neuilly, se répandant d’un côté vers Courbevoie et Puteaux, de l’autre vers Rueil. Dès le matin la brigade Daudel et une brigade de la division Bruat se mettaient en marche par Montretout et par Bougival, appuyées par la cavalerie de Gallifet, qui se trouvait dans la plaine. A onze heures, on était au rendez-vous général, au rond-point des Bergères, devant l’ennemi, lorsqu’un incident précipitait l’action. Le médecin en chef de l’armée, le docteur Pasquier, venait de tomber sous une balle fédérée. Aussitôt le combat s’engageait. Le 74e, le 113e de ligne, les marins, les gendarmes, attaquaient les insurgés dans les maisons, derrière les barricades, et les rejetaient bientôt vers le pont de Neuilly par où ils s’échappaient en déroute. Ce premier engagement décidait de l’attitude des troupes. — Deuxième rencontre dès le lendemain, le 3 avril. Cette fois c’est la grande sortie parisienne, le grand mouvement sur lequel les stratégistes de la commune ont compté pour enlever Versailles. Des forces nombreuses de l’insurrection sortent résolument dès le matin par trois points à la fois. Bergeret et Flourens dirigent le mouvement par la route de Saint-Germain. Eudes conduit les fédérés sur Meudon et la vallée de Sèvres. Duval, un ouvrier fondeur en fer, transformé en général, est à Châtillon. C’est la partie décisive contre Versailles. Par malheur, à peine engagés sur la route de Saint-Germain, les fédérés de Bergeret sont maltraités par le Mont-Valérien, qui les foudroie et les disperse. Ceux qui ne s’enfuient pas sont menacés d’être coupés par les troupes accourues de Versailles, et dans une maison du côté de Nanterre, Flourens lui-même, après avoir fait feu sur un gendarme, est abattu d’un coup de sabre. A Meudon, Eudes trouve devant lui la brigade Lamariouse et les gendarmes du colonel Gremelin, qui le mettent en