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avait donné l’entrée au sénat, il dut être édile ou tribun du peuple, puis préteur en 85 ou 86, consul subrogé en 91, car son nom figure à cette date dans les fastes de la confrérie religieuse des sodales augustales, qui se réunissaient à Bovilies, à 12 milles de Rome, au pied du mont Albain ; ensuite il commanda les légions et fit la guerre contre les Germains ; il se trouvait dans la province impériale consulaire de Germanie inférieure en qualité de gouverneur, c’est-à-dire avec le titre de légat de l’empereur, lorsqu’au mois d’octobre 97 il fut adopté par Nerva comme étant le plus digne et le plus capable de lui succéder. Il avait été désigné pour un second consulat, qu’il exerçait à partir du 1er janvier 98, lorsque mourut son père adoptif le 27 du même mois. Trajan se trouvait alors à Cologne, la capitale de sa province, lorsque son petit-cousin, qui fut plus tard l’empereur Hadrien, vint lui annoncer qu’il était maître de l’empire. C’est cette année même que Tacite écrivit les Mœurs des Germains, et il est à croire que Trajan, qui avait conduit pendant plusieurs années les expéditions victorieuses au-delà du Rhin et avait reçu dès 96 le surnom glorieux de Germanique, ne fut pas étranger aux renseignemens, d’ailleurs exacts, qui lui avaient été fournis sur ces peuples.

Le nouvel empereur ne se pressa pas de venir à Rome ; il régla les affaires des provinces frontières et dut même ne rentrer en Italie qu’après avoir visité la vallée du Danube. C’est en 99 seulement qu’il fit avec sa femme Plotine cette entrée simple et modeste que le Panégyrique de Pline, consul de l’année suivante, a célébrée en paroles ambitieuses. Certes ce document, plus oratoire qu’historique, et qui a recommandé à la postérité les premiers actes de Trajan, n’a dû produire qu’une médiocre impression sur les contemporains, car il étalait plutôt, comme l’a si bien dit M. Des Vergers, « des espérances, » qu’il ne racontait les faits d’un règne qui promettait d’être glorieux, mais n’avait encore eu que quelques mois de durée. Tacite avait été consul subrogé en 97 ; Frontin, l’auteur du rapport officiel qui nous a été conservé sur les Aqueducs de Rome, avait remplacé Nerva dans le consulat de 98. Trajan fut le consul éponyme de l’an 100 avec ce même Frontin, et Pline fut un des six consuls subrogés de cette même année. Il n’entra en fonctions que le 1er juillet, le Panégyrique se trouve donc ainsi daté. Nous y voyons que le nouvel empereur avait puni les délateurs, et l’on sait que les deux beaux vers du Britannicus de Racine :

Les déserts autrefois peuplés de sénateurs
Ne sont plus habités que par leurs délateurs,


sont une traduction littérale du passage relatif à cette mesure ; il abolit la loi de majesté, les pantomimes, restreignit l’impôt du