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avait tenu à ne pas être seulement l’hôte du congrès. Ses professeurs ont largement payé de leur personne et de leur science, et M. Antonovitch se montra, pendant toute la durée de la session, le secrétaire laborieux de l’assemblée et le vaillant collaborateur du comte Ouvarof.

Le choix même de Kief pour lieu de réunion devait donner au troisième congrès un caractère particulier. Cette ville est plus rapprochée que Moscou et Saint-Pétersbourg des pays slaves, c’est-à-dire de la Pologne prussienne, des royaumes autrichiens, des principautés danubiennes ; elle est en communication rapide avec toutes ces régions. En outre, mêlant dans sa population des Grands-Russes, des Petits-Russes et des Polonais, elle est la ville slave par excellence, une sorte de cité neutre entre les groupes qui se sont disputé à diverses époques de l’histoire l’hégémonie du monde slave. Aussi le nombre des étrangers accourus à ce congrès a-t-il été plus considérable qu’aux deux premières réunions de Moscou et de Saint-Pétersbourg. La Serbie, la Hongrie, qui compte dans son sein tant de populations slaves, la Moravie, la Bohême, la Bukovine, la Galicie, la Pologne prussienne elle-même, avaient envoyé leurs représentans. Le congrès avait en quelque sorte un caractère panslave, comme ce fameux congrès ethnographique de Moscou qui a fait tant de bruit en 1867. Celui de 1874 ne semble pas avoir soulevé de si vives protestations. On trouvera peut-être qu’aujourd’hui ce ne sont pas les ambitions moscovites qui menacent l’avenir de l’Europe ; d’ailleurs les Russes ne peuvent guère faire à eux seuls de l’archéologie slave. Les antiquités russes s’expliquent mieux par la comparaison avec les antiquités des peuples congénères : les souvenirs mythologiques, les vieilles superstitions, les légendes poétiques ont besoin d’être expliquées par celles qui ont cours chez les Serbes ou chez les Bohémiens ; la philologie, l’explication des alphabets slavons, sont des points qui demandent à être traités dans un congrès international. Il s’agit non pas d’archéologie panslave, mais d’archéologie comparée.

Le congrès fut inauguré le 14 août, dans la salle des actes de l’université, par les discours du général-gouverneur des trois provinces, du maire de Kief, du recteur de Saint-Vladimir, qui prirent successivement la parole pour donner, au nom du gouvernement, de la ville, de l’université, la bienvenue aux membres du congrès. Le comte Ouvarof expliqua le but de cette nouvelle assemblée et la division adoptée pour ses travaux. « Après les deux premiers congrès de Moscou et de Saint-Pétersbourg, ajouta-t-il, les savans russes avaient exprimé le désir unanime de tenir à Kief le troisième congrès ; la haute signification de cette ville est trop