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quant à présent, d’avoir rappelé les motifs qui ont déterminé l’adoption de ce principe et de faire observer que dans l’application il n’est pas d’une rigidité absolue, puisqu’il a plié plus d’une fois.

Indépendamment des lignes que l’on peut appeler nationales, parce qu’elles intéressent l’ensemble des communications entre les diverses régions du pays, se produisirent des demandes de voies ferrées qui ne présentaient qu’un intérêt purement local. Pour ces dernières, il n’eût pas été équitable d’appliquer la procédure administrative ni le système financier qui avaient été adoptés pour la concession des lignes du grand réseau : elles devaient être assimilées à la voirie vicinale, concédées avec un mécanisme plus simple, construites et exploitées à l’aide des ressources que fourniraient les localités spécialement intéressées, tout en méritant d’obtenir en certains cas, mais dans une proportion limitée, l’assistance du trésor public. Tel fut l’objet de la loi de 1865 sur les chemins de fer d’intérêt locale dont le caractère est déterminé par leur titre même.

En résumé, sans qu’il soit besoin d’entrer dans les détails financiers, l’on peut saisir par ce court exposé le système qui a présidé à l’organisation des chemins de fer en France. Le réseau d’intérêt général est tracé par l’état, décrétant les lignes qu’il est utile de construire et les concédant soit aux grandes compagnies fusionnées, qui, par la garantie d’intérêt, sont devenues ses instrumens, soit à des compagnies nouvelles. Quant aux voies ferrées d’intérêt local, l’état ne trace pas le plan des lignes, il laisse aux départemens, aux communes, aux particuliers, sauf son droit supérieur de contrôle, l’initiative des projets et le soin de l’exécution. Le système est donc théoriquement en mesure de donner satisfaction à tous les intérêts, à l’intérêt général et à l’intérêt local, lorsque l’utilité se manifeste et selon les ressources du capital disponible, du crédit et des budgets.

Dans les pays étrangers, on a procédé autrement. En Belgique et en Allemagne, les chemins de fer sont construits et exploités en grande partie par l’état. En Angleterre et aux États-Unis, le gouvernement est resté complètement étranger à la construction et à l’exploitation des chemins de fer. Les compagnies se sont formées, elles ont sollicité la concession des lignes qui leur paraissaient devoir être avantageuses, et, sauf de très rares exceptions, leurs demandes ont été accueillies, de telle sorte qu’il n’y a pas de limite au nombre des compagnies ni au nombre des lignes, pas de règle dans la constitution du réseau, pas de distinction entre les chemins d’intérêt général et les chemins d’intérêt local, pas d’intervention