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— Naturellement. Celui que vous me proposez…

— Je ne te propose rien, je fais une commission.

— Sans désirer qu’elle m’agrée ?

— Tu peux, sans te gêner, m’envoyer promener ; mais tu ne peux pas me répondre, tu ne connais que de nom la personne dont il s’agit.

— Alors je vous ai répondu. Je ne refuse pas de la voir, à moins que vous ne me disiez d’avance qu’elle ne me convient pas du tout,

— Tu me croirais sur parole ?

— Vous ne voudriez pas me tromper !

— Certainement non ! Eh bien ! le jeune homme a un défaut, il est trop jeune.

— Plus jeune que moi ?

— Oui.

— Et puis ?

— Et puis, et puis… Comme tu y vas ! Tu passes outre sur la principale objection.

— Je n’ai pas dit que je n’en tenais pas compte. Je demande à tout savoir.

— Il est moins riche que toi pour le moment, mais plus tard il le sera probablement davantage.

— Et après ?

— Après ? rien que je sache. Je ne le connais guère que de vue, j’ai fort peu causé avec lui.

— Quelle figure a-t-il ?

— Une assez belle figure ; grand, bien fait, beau garçon en un mot.

— Et quel air ?

— L’air content de lui, puisqu’il faut tout dire.

— Vous ne me dites rien de sa famille ?

— Très honorable et sur laquelle tu pourras te bien renseigner. Elle est du pays et l’a quitté il y a une dizaine d’années.

— Est-ce que ce ne serait pas un fils Gaucher dont vous me parlez ?

— Je ne comptais pas le nommer avant d’avoir ton assentiment à la présentation ; mais puisque tu devines si bien…

— Je ne me rappelle pas bien,… dit Marianne pensive, ils sont deux ou trois ?

— Ils sont deux. C’est le plus jeune qui aspire à ta main.

— Il aspire… Je me le rappelle très confusément. C’était un enfant. Il ne doit plus se souvenir du tout de moi. Il a donc besoin de mon petit avoir ?

— Il n’aspire pas précisément, c’est son père ;… mais, tiens, j’ai la lettre ; puisque tu sais tout, tu peux la lire. Marianne s’arrêta pour lire la lettre du père Gaucher. Elle le fit