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l’Écriture sainte, ne sont pas sans doute des œuvres littéraires, mais elles sont de précieux élémens pour l’intelligence de Racine et de Bossuet. Inutile de dire qu’il en est de même, et à plus forte raison, des correspondances. Ajoutez-y de savantes introductions soit biographiques, soit bibliographiques, des notices précises sur chaque ouvrage, des notes historiques, critiques, philologiques, enfin, ce qui est le plus précieux, des lexiques sur la langue des écrivains, et, comme supplémens, de curieux albums, fac-similé, portraits, maisons célèbres, le tout sous la savante direction que nous avons dite et avec le concours des écrivains les plus compétens ; ajoutez-y la beauté sévère de la publication et de la typographie, et vous n’hésiterez pas à reconnaître que la collection des Grands Écrivains de la France[1] est appelée à devenir la première de toutes nos collections de classiques, et l’un des monumens littéraires les plus importans de notre siècle.


I

Nos réflexions nous ayant inspiré le désir de relire les tragédies de Racine au point de vue philosophique, nous avons eu occasion de vérifier par nous-même avec quel soin, quelle diligence et quel goût l’édition de Racine, dans la collection Régnier, a été exécutée. L’éditeur est M. Paul Mesnard, l’un de nos critiques les plus délicats et les plus instruits. Chez M. Mesnard, l’amour du beau n’est pas absorbé et étouffé par le goût de l’érudition et n’exclut pas l’amour de l’exactitude[2]. Il porte généralement dans ses enquêtes littéraires la précision la plus scrupuleuse, en même temps que dans sa critique un sentiment pur et un tact des plus fins. Il est ce qu’on appelait autrefois un homme de goût. On sent que la littérature n’est pas seulement pour lui une étude, mais qu’elle a son amour et qu’elle remplit sa vie. Déjà il avait écrit sur Mme de Sévigné une notice biographique, encore neuve après les travaux de Walkenaer, mais qui l’emporte Beaucoup sur l’œuvre de celui-ci par le sens psychologique et la peinture des caractères. Le même mérite se retrouve dans sa notice sur Racine, qui est également une étude psychologique des

  1. Les ouvrages publiés jusqu’à ce jour sont les Lettres de Mme de Sévigné par M. de Montmerqué, — les Œuvres de Corneille, par M. Marty-Laveaux, — de Malherbe, par M. Ludovic Lalanne, — de Racine, par M. Paul Mesnard, — de La Bruyère, par M. Servois, — de La Rochefoucauld, par M. Gilbert, — du cardinal de Retz, par M. Alp. Feillet, — de Molière (t. I et II), par M. Eugène Despois.
  2. Nous nous permettrons de signaler à M. Paul Mesnard une très légère inexactitude dans le portrait de Racine, qui fait partie de l’Album : on le fait naître en 1636 au lieu de 1639, confondant ainsi la date de naissance de Racine avec celle de Boileau.