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houillères et les plus grandes forges, a toujours été le nid préféré du protectionisme. Encore aujourd’hui, ce sont les députés et les sénateurs pensylvaniens qui font, dans les discussions du congrès fédéral, le plus d’opposition aux doctrines du libre-échange, que les gens de l’ouest voudraient voir triompher. C’est à Philadelphie que réside l’apôtre le plus infatigable de la protection, l’économiste Carey, dont les années n’ont pas ralenti l’ardeur. Dans les états agricoles du sud, et même dans les états industriels de la Nouvelle-Angleterre et à New-York, règnent des idées plus libérales, défendues énergiquement par un statisticien de talent, M. Ruggles, et surtout par l’ancien commissaire du revenu, M. David A. Wells, dont les écrits ont fait récemment sensation, même en Europe.

Autrefois c’était l’Angleterre qui redoutait la fabrication du fer dans ses colonies d’Amérique, aujourd’hui ce sont ces anciennes colonies qui s’effraient de l’importation du fer anglais. Et cependant les États-Unis n’ont plus rien à craindre de la Grande-Bretagne. Ne fabriquent-ils pas eux-mêmes désormais tous leurs rails, tout leur acier, qu’hier encore ils recevaient du dehors en quantités si considérables ? Ils viennent immédiatement après leur lointaine rivale dans l’application du fameux procédé Bessemer pour la fabrication en grand de l’acier, et chez eux, non moins que dans le royaume-uni, les inventeurs sont jour et nuit à l’œuvre pour, perfectionner les appareils et les fours spéciaux où l’on élabore ce métal et ceux où l’on traite la fonte et le fer. Aucune manipulation n’est devenue plus délicate que celle-ci, qui semblait fixée pour toujours ; nulle part les indications de la chimie ne jouent un rôle aussi prépondérant. Quelques centièmes, souvent même quelques millièmes en plus ou en moins de carbone, telles sont à peu près les seules différences que le métal présente dans sa composition chimique sous chacun de ses trois états. La présence du soufre, du phosphore, du silicium, de l’arsenic, du manganèse, du chrome, à doses souvent infinitésimales, exerce, aussi une influence bonne ou mauvaise selon les corps. Les métallurgistes américains, comme ceux d’Europe, ont étudié à l’envi ces réactions, et n’ont pas reculé devant la dépense pour faire venir, même d’Algérie, des minerais que l’on croyait doués de propriétés spéciales. Ils ont fait plus, ils ont mis en action le puddlage mécanique, et demandé à la vapeur d’accomplir cette rude opération que les bras d’un athlète peuvent seuls exécuter, non sans danger pour les organes. Enfin ils ont, eux aussi, assoupli le métal à une foule d’applications industrielles : construction de machines à vapeur, de locomotives, de navires, de ponts, d’instrumens agricoles, de roues et d’essieux de wagons, de tuyaux de conduite, d’appareils domestiques de chauffage, de poutres et de cornières pour charpentes. Qui ne connaît dans l’art