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pas la meilleure des preuves ? Le premier, M. Amari a lu ces inscriptions en entier, et que disent-elles ? Que Guillaume Ier et Guillaume II ont élevé ces châteaux pour leur habitation et leurs plaisirs. Ici donc encore les Arabes travaillèrent pour les Normands. Les architectes firent comme Edrisi, qui écrivit en arabe pour Roger son fameux traité de géographie, comme les poètes qui faisaient des kasida arabes en l’honneur de leurs nouveaux maîtres.

À Montréal, à Cefalù, l’influence arabe est moins forte qu’à Palerme. L’abbaye de Montréal, la cathédrale de Cefalù, sont des églises romanes décorées à la byzantine. La mosaïque y flamboie dans toute sa splendeur. Qu’on se figure une de nos cathédrales historiée de bas en haut comme les pages d’une Bible resplendissante. L’exécution à Cefalù offre une perfection qu’on ne trouve pas ailleurs. À Montréal, quelques scènes bibliques, surtout celle de la création, sont représentées d’une façon entièrement neuve. Les portes de bronze de Montréal rappellent celles de Ghiberti à Florence pour la grandeur et la naïveté ; elles sont de 1186. Dans le cloître, chacun des chapiteaux sculptés voudrait une étude de plusieurs heures.


II.

Ces merveilles de l’art siculo-normand ayant leur centre à Palerme, nous pûmes les étudier à loisir, sans déserter les travaux du congrès. La visite que nous fîmes aux belles fouilles dirigées par le prince de Scalea et M. Cavallari dans l’ancienne ville phénicienne de Solonte ne nous empêcha pas non plus de donner à ces intéressantes discussions l’attention qu’elles méritaient. Les congrès de scienziati, établis vers 1840 par quelques savans patriotes et libéraux, entre lesquels on doit nommer le prince de Canino, jouèrent autrefois un grand rôle dans l’œuvre de l’unité et de l’indépendance de l’Italie. Le but en était alors, il faut bien le dire, plus politique que scientifique. Il s’agissait de donner aux hommes éclairés des différentes parties de l’Italie la facilité de se voir et de s’entendre. L’œuvre nationale une fois accomplie, on eût pu tenir pour superflues des réunions qui avaient servi de prétexte, à une époque de suspicion, pour préparer cette œuvre. On ne le fit pas, et l’on eut raison. On conserva comme un souvenir ces assemblées périodiques, devenues désormais moins importantes en un sens, et dans un autre plus sincères. Le congrès de Palerme a été digne de son titre et des savans italiens qui s’y sont trouvés réunis. Un parlement scientifique dont faisaient partie le père Secchi, M. Blaserna,