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appartenaient à une de ces petites dynasties locales qui, sous la suzeraineté des rois de Perse, comme sous la domination des pharaons d’Égypte ou des monarques assyriens, continuèrent de régner sur l’antique cité phénicienne. La numismatique et surtout la nature des sculptures de la stèle, où les élémens égyptiens et perses sont évidens, peuvent aider à résoudre le problème. En effet, les noms des derniers rois de Byblos conservés sur les monnaies sont ceux des Og, des Azbaal, des Aïnel ; celui-ci ayant été détrôné par Alexandre, les dynastes de la stèle de Byblos sont antérieurs : c’est donc à une époque encore voisine de la domination égyptienne, bien que postérieure à la conquête de Cyrus, c’est-à-dire dans la première moitié du Ve siècle, qu’il convient de les placer.

La seconde phrase de l’inscription de Yehawmelek fournit quelques indications précieuses sur la disposition même du grand temple de la déesse de Byblos. Rapprochées des figures des monnaies frappées sous Macrin, elles permettent de se représenter assez nettement l’économie du sanctuaire. L’édifice dominait la ville et s’apercevait sans doute de la mer. Le sanctuaire même était précédé bu entouré d’une enceinte sacrée, au milieu de laquelle était un autel de bronze ; on y avait accès par une porte d’or accompagnée de portiques à colonnes ; une petite pyramide s’élevait au-dessus de la porte d’or. Des portes d’or, c’est-à-dire en bois doré, brillaient aussi à l’entrée du parvis du temple d’Hiérapolis, si bien décrit par l’auteur de la Déesse syrienne. Le fauve éclat de l’or resplendissait partout, aux voûtes du sanctuaire comme sur les symboles et les vêtemens des dieux ; enfin il est fait mention d’un grand autel d’airain qui s’élevait au dehors.

Dans la région du Liban au-dessus de Byblos et dans la vallée du fleuve Adonis, les monumens qui subsistent sont de basse et de très basse époque ; tout est du style grec et romain des premiers siècles de notre ère ; le grec et le latin sont aussi les langues épigraphiques du Liban. A Maschnaka, une cour sacrée où se voient les débris d’un édicule aux chapiteaux corinthiens demeuré inachevé semble avoir été un des « tombeaux d’Adonis. » Les sculptures taillées dans le roc, d’un caractère évidemment religieux, de Irapta, de Maschnaka, de Ghineh, sont tout aussi modernes. Celle de Irapta, sans doute plus ancienne, représente un sacrifice : la beauté des attitudes, la noble simplicité des draperies, étonnent et charment un moment ; mais je ne sais rien de moins propre à entretenir l’illusion sur les vieux cultes du Liban qu’une Baalath en pleurs dans une cella d’ordre ionique et un Adonis costumé en empereur romain.

A Sidon, comme à Tyr, ce n’est plus sur le sol, c’est au sein de la terre qu’il faut rechercher quelques vestiges de leur passé