Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 7.djvu/436

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

indique un certain progrès de la richesse publique. Dans l’ensemble des produits de l’importation et de l’exportation communs à tout l’empire, la Hongrie a contribué aussi, quoique dans une moindre part que l’Autriche, à l’augmentation générale. Sans donc affirmer que la question à résoudre n’offre pas de sérieuses difficultés et n’exige pas une expérience et une habileté dont les hommes politiques chargés des destinées de leur pays sont loin d’avoir toujours fait preuve, il n’y a toutefois pas lieu de désespérer.

Jusqu’en 1848, la nation se composait de nobles et de serfs, la classe, moyenne, celle qui partout travaille, économise, se livre à l’industrie, faisait entièrement défaut. On ne connaissait sur ce territoire de 5,800 lieues sans routes ni voies navigables que la très grande ou la très petite propriété : celle-ci contient aujourd’hui même 3 millions 1/2 de parcelles à côté de domaines énormes, sans grande valeur, comme ceux de l’état, qui dépassent 5 millions de yochs, environ 3 millions d’hectares. La moyenne propriété n’existe pas encore, c’est-à-dire celle qui peut tirer le meilleur parti de terres d’une incroyable fécondité. Quoi d’étonnant que les excitations de la politique aux premiers jours de l’indépendance aient tout d’abord absorbé les préoccupations publiques ? En sera-t-il toujours ainsi ? Nous ne le croyons pas. Le goût du travail honnête et sérieux naîtra des nécessités financières elles-mêmes, et, comme on l’a si bien constaté pour l’Italie, le besoin de faire face aux charges de l’état, en même temps que le goût des améliorations individuelles, précipitera un mouvement dont le succès n’est pas douteux. A côté de l’agriculture transformée, l’industrie, jusqu’ici à l’état d’enfantement, prendra possession de ces voies ferrées dont on aura réformé le système, et le crédit public aura enfin trouvé une assiette solide. De telles espérances ne sont pas chimériques, et pour notre compte, si nous comparons la conduite politique et sage qu’a tenue la Hongrie à l’époque de l’établissement du dualisme avec les excès, les prétentions, les illusions d’indépendance et d’autonomie absolues qui n’auraient pas manqué de se produire et de s’imposer en de pareilles circonstances dans d’autres pays, nous croyons qu’elle réalisera les progrès désirés ; mais il ne faut pas se dissimuler cependant qu’ils ne s’obtiendront pas sans de réels sacrifices et de sérieux efforts. Le ministre actuel des finances, son jeune et habile collègue des travaux publics, le comte Joseph Zichy, sont appelés à provoquer des mesures d’où peut dépendre le sort ou tout au moins la prospérité financière de leur pays.