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l’Égypte, comme un principe de la réforme, la juridiction criminelle : d’après sa déclaration rapportée dans une dépêche de M. le comte de Vogüé, ambassadeur de France à Constantinople, « l’opinion du khédive était si formelle à cet égard qu’il était disposé à renoncer à tout le système, malgré les avantages reconnus, plutôt que de céder sur ce point… » En même temps M. de Vogué informait le ministre des affaires étrangères, M. de Rémusat, que la plupart des ambassadeurs, ébranlés par les argumens du ministre égyptien et désarmés par les concessions qui étaient offertes sous le rapport de la procédure, ne paraissaient plus éloignés de se rallier, aux propositions du khédive.

Cependant quelques-uns des cabinets intéressés jugèrent plus prudent de s’associer à la résistance que le gouvernement français continuait d’opposer aux prétentions de Nubar-Pacha. Les cabinets de Londres et de Vienne, puis le cabinet de Saint-Pétersbourg firent cause commune avec celui de Versailles, et l’on en vint, après de nombreux pourparlers, à restreindre la juridiction criminelle des tribunaux égyptiens aux seuls cas où il y aurait lieu de réprimer les crimes ou délits commis contre les magistrats et contre l’exécution de leurs sentences, ainsi du reste que le prescrivent la plupart des codes européens. Une commission spéciale, composée des délégués de onze puissances, fut chargée de définir la nature et les différentes catégories de ces crimes ou délits, de déterminer l’échelle des peines et de tracer la procédure pour ces procès exceptionnels. Les travaux de cette commission, qui ne tint pas moins de sept longues séances, sont consignés dans un rapport du 15 février 1873 : ils paraissaient devoir être le dernier mot de ces négociations si prolongées, et Nubar-Pacha, en adressant le 24 février à chacun des ambassadeurs le texte du règlement relatif à la réforme judiciaire en Égypte, put espérer que l’œuvre commencée en 1867, poursuivie avec tant de persévérance par le khédive et débattue si vivement, allait être achevée.

Tout n’était pas fini cependant. Attentif à ne rien signer qui pût laisser indécises les limites de la juridiction pénale et à n’omettre aucune des garanties qu’il jugeait nécessaires, le gouvernement français crut devoir signaler dans le texte du règlement divers points qui lui paraissaient sujets à explication ou même à révision. Les ministres des affaires étrangères, M. le duc de Broglie, puis M. le duc Decazes, fidèles aux traditions de prudence qui avaient inspiré la correspondance de M. de Rémusat, discutèrent encore, notamment pour que les déclarations de faillite demeurassent dans les attributions des tribunaux consulaires au même titre que toutes les causes intéressant le statut personnel. Cette continuation des débats présentait les plus grandes difficultés, l’Angleterre,