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FROISSART RESTITUE
D'APRES LES MANUSCRITS DANS UNE EDITION NOUVELLE

La Société de l’histoire de France, à qui nous devons depuis quarante ans tant d’importantes publications, ne se propose pas seulement de mettre au jour les documens inconnus qui intéressent le passé de notre pays, elle cherche aussi à donner des éditions nouvelles et meilleures de nos anciens historiens. À ce titre, Froissart ne pouvait pas lui échapper : aucun n’a été jusqu’ici plus maltraité des éditeurs. Le grand chroniqueur du XIVe siècle, celui qui a raconté nos premières luttes nationales contre l’étranger, et en qui revit toute une époque, n’a été encore publié que d’une manière très imparfaite. On l’admire, on s’en sert, on le cite partout, et l’on n’a de ses œuvres que des copies défigurées.

Ce n’est pas que des efforts sérieux n’aient été tentés de nos jours pour le faire enfin connaître tel qu’il est. En France, en Angleterre, en Belgique (ces trois pays à la fois sont intéressés dans son histoire), on s’est souvent occupé de lui. Beaucoup de savans ont rêvé toute leur vie d’attacher leur nom à une édition définitive de ses Chroniques : le plus grand nombre a reculé devant la difficulté de la tâche ; quelques-uns l’ont essayé avec des succès divers, mais sans y réussir jamais entièrement. Leur peine n’a pourtant pas été tout à fait perdue : il était difficile que ce travail commun de trois nations différentes autour d’un grand historien n’eût aucun résultat. On a éclairci des points obscurs, redressé des erreurs, fait des découvertes importantes. Si le monument définitif n’a pas été encore construit, on peut dire que les alentours du terrain sont aplanis et déblayés, et que la place pour le bâtir est prête. La Société de l’histoire de France a jugé qu’après ces travaux préliminaires le