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nomades vouées à ces expéditions commencent leurs marches aux environs d’octobre et se dirigent vers le Pendjab, d’où leurs marchandises gagnent les grands marchés de l’Inde : Amritsir, Benarès, Calcutta, etc. Ces importations comprennent des laines pour les cachemires de seconde qualité qui se fabriquent dans le Pendjab, des soies grèges, de l’or et de l’argent en barre, du borax, des fruits frais et secs. À leur retour, les caravanes emportent des étoffes de coton et de laine, des écharpes brodées de Delhi, des brocarts de Bénarès, de l’indigo. Ce trafic existe depuis un temps immémorial malgré les droits élevés et les vexations que les princes du Caucase indien où leurs agens n’épargnent pas aux voyageurs. Pendant ces dernières années, le gouvernement anglais s’est occupé à plusieurs reprises de diminuer les difficultés de la route et d’ouvrir de nouvelles voies de trafic aux frontières terrestres de ses domaines. En 1867, l’initiative de l’agent diplomatique à Ladak a développé un courant d’échanges à travers les passes de l’Himalaya, entre l’Inde et le Turkestan oriental. Trois ans après, en 1870, le maharajah du Cachemire, sous la pression de l’agent anglais, accorda, moyennant réciprocité, le libre transit à travers ses domaines aux expéditions destinées à l’Asie centrale. Ces nouvelles voies ne peuvent manquer d’attirer l’attention des fabricans de Manchester et de Bradford, à qui elles ouvrent le marché de l’Asie centrale, où leurs cotonnades peuvent parvenir à moins de frais que les articles similaires expédiés de Moscou[1]. D’un autre côté, les expéditions de retour, soies brutes, métaux précieux, conviennent par leur petit volume à des voies de communication difficiles. Les routes de commerce de l’Inde aux plateaux du Thibet ne traversent pas exclusivement la chaîne septentrionale de l’Himalaya ; il en est d’autres à travers les passes de la chaîne orientale par le Nepaul et l’Assam. Notons dans cette dernière province la foire de Sudya, où les tribus voisines apportent des peaux et des caoutchoucs, et qui est appelée à servir dans un avenir prochain de tête de pont aux relations entre l’Inde et les provinces occidentales de la Chine.

Les foires qui suivent les pèlerinages hindous ou musulmans à des lieux consacrés jouent un rôle des plus importans dans le commerce intérieur de l’Inde. Parmi ces solennités à la fois religieuses et commerciales, il faut citer en première ligne la foire d’Hurdwar, qui se tient chaque année, aux premiers jours d’avril, au débouché du Gange, dans les plaines où, suivant la tradition, Wishnou com-

  1. On établit en effet que les frais de transport d’Angleterre à Kashgar, l’un des principaux marchés du Turkestan oriental, s’élèvent pour 100 livres de coton fabriqués à 97 francs. Le même envoi expédié de Moscou coûterait 109 fr. 50 c.