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opportunité à présenter de nouveau le système d’amortissement en lui donnant une forme pratique dont la réalisation pourrait être immédiate. Tel est l’objet des propositions qui vont suivre.

Peut-être m’adressera-t-on le reproche de vouloir dégrever le présent aux dépens de l’avenir. Je dois repousser tout de suite cette objection par une sorte de déclaration de principes financiers. Il convient en effet qu’il ne subsiste aucun doute sur les principes généraux qui m’ont inspiré le nouveau système d’amortissement.

D’accord avec les financiers les plus éminens et en particulier avec l’honorable M. Magne, je reconnais de la manière la plus absolue :

Premièrement qu’un pays qui, dans les temps prospères, n’amortit pas sa dette est à l’état de banqueroute latente, car il en est des états comme des particuliers : qui ne sait épargner dans les jours d’abondance est ruiné infailliblement quand arrivent les jours de l’adversité ;

Secondement que le temps est passé où l’Angleterre et la France croyaient de bonne foi amortir leur dette en remboursant d’une main et en empruntant à nouveau de l’autre ; — il est admis aujourd’hui qu’il n’y a d’amortissement réel que celui qui résulte de l’excédant des recettes sur les dépenses, tout autre mode d’amortissement est fictif et sans aucune valeur ;

Troisièmement que, par suite, tout système financier qui ne contient pas en lui-même le principe de la diminution progressive de la dette publique est dangereux, et doit être repoussé sans autre examen.

Ces vérités proclamées, je soutiens que la valeur de la nue propriété des chemins de fer appartenant à l’état est très grande, et qu’il est injuste de la considérer comme problématique, sous le prétexte que l’entrée en jouissance de l’état ne doit avoir lieu que dans un temps éloigné ; chaque jour en effet rapproche le terme, et qu’est-ce que soixante-quinze ou quatre-vingts ans comparés à la perpétuité de la dette publique ?

Dans ma conviction, cette propriété très réelle peut servir de base à un système financier ; c’est cette conviction que je m’attache à faire prévaloir, persuadé qu’on peut, sans manquer aux lois de la prudence, dégrever le présent d’une portion des charges si lourdes qui pèsent sur lui et affecter dès aujourd’hui soit à des travaux d’utilité publique, soit à la réduction des impôts, une grande partie des ressources qui sont appliquées à l’amortissement de la dette flottante. Les impôts, décrétés et subis patriotiquement sous le coup de la nécessité, sont devenus écrasans ; ils pèsent sur la production, ils entravent la circulation, ils risquent de compromettre nos plus