Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 7.djvu/939

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 février 1875.

Allons-nous assister jusqu’au bout à la décourageante manifestation d’une impuissance définitive dans l’assemblée qui dispose des destinées de la France ? Touchons-nous au contraire à un de ces momens où de l’excès des confusions et de la crise la plus aiguë doit se dégager en désespoir de cause la solution vainement demandée jusqu’ici à la réflexion ? Assurément, si la nécessité d’en finir, de se fixer avait besoin d’être démontrée, elle serait écrite en traits saisissans dans tout ce qui se passe depuis bien des mois, et particulièrement depuis qu’on s’est décidé à entrer dans la discussion de ces lois constitutionnelles toujours fuyantes, toujours livrées aux mauvais vouloirs, aux prétentions et aux disputes implacables des partis.

Tant qu’il ne s’agissait encore que des travaux obscurément préparés et systématiquement retenus dans une commission, des messages inutilement adressées à l’assemblée par M. le président de la république, des motions d’ajournement proposées ou acceptées par un ministère dans l’embarras, il n’y avait que du temps perdu, rien n’était en définitive compromis. Le délai même, si pénible qu’il fût, pouvait profiter à l’apaisement, à la conciliation, à une solution de concorde et d’équité. Aujourd’hui la question n’est plus là. On est en pleine discussion, en pleine crise depuis plus d’un mois, et cette crise, un instant adoucie en apparence, aussitôt ravivée et envenimée par toutes les passions hostiles, ne fait que s’aggraver en devenant d’heure en heure plus obscure. Les résolutions se confondent et se contredisent. La majorité de la veille n’est plus la majorité du lendemain. Ce qu’on a fait en janvier, on le défait, on le met en doute en février. La loi sur l’organisation des pouvoirs publics, modifiée dans une pensée de transaction, a la chance de passer à une deuxième lecture ; quelques jours plus tard, elle disparaît presque par l’insuccès de la loi sur le sénat, adoptée elle-même en