Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 8.djvu/438

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LA
DERNIERE REVOLUTION
DE BUENOS-AYRES

Il y a quelques mois, la nouvelle inattendue d’une révolution à Buenos-Ayres s’étendant à toutes les provinces de la république argentine produisait une vive impression sur les esprits les plus habitués aux convulsions politiques dont les rives de la Plata sont si souvent le théâtre. Elle était grave par le nom retentissant de l’homme qui en avait assumé la responsabilité, elle a pris une importance plus grande encore par la rapidité avec laquelle, contre toutes les traditions de ces républiques, elle se terminait. En deux mois en effet, cette révolution qui soulevait l’immense république tout entière, qui mettait en péril le commerce de ces pays et troublait la bourse de Londres, était réduite et désarmée, et cessait de mériter le nom de révolution pour rester ce qu’elle était, une insurrection de mécontens et d’ambitieux inhabiles aux coups d’état. Ces deux mois de guerre civile, les faits qui les ont précédés, la manière dont l’insurrection a été réduite, marquent dans l’histoire de la république argentine, et l’on peut dire même dans celle des républiques hispano-américaines en général, une date mémorable. Ils semblent démontrer que le temps est passé où les révolutions et les guerres civiles américaines s’enchevêtraient sans logique apparente, où une insurrection succédait à une autre, où un groupe de quelques hommes imposait par la force sa volonté jusqu’à ce qu’un autre se présentât pour le même objet.

Macaulay a écrit avec raison qu’une révolution de huit jours dans Londres produirait une commotion dont les effets se ressentiraient pendant un demi-siècle jusque dans les pays les plus reculés. Ce qui était vrai alors pour la ville de Londres l’est aujourd’hui dans