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de faiblesse ? On l’a vu après 1848 : est-ce que les commissions de permanence et l’assemblée elle-même ont empêché le 2 décembre 1851 ? On a pu le voir dans ces dernières années : est-ce que les commissions permanentes n’ont pas été une occasion de médiocres interpellations fort inutiles, souvent puériles, se reproduisant tous les quinze jours pendant les vacances parlementaires ? La force préservatrice n’est point dans les restrictions, dans les petites précautions, elle est surtout dans l’honnêteté des gouvernemens, dans le sentiment qu’ils ont de leurs devoirs et de leur responsabilité.

Il y a une autre question qui, sans avoir un caractère constitutionnel, met aujourd’hui tous les partis aux prises et est peut-être plus grave que celle des prérogatives du pouvoir exécutif parce qu’elle touche à des points plus délicats, parce qu’elle peut même conduire à des scissions nouvelles, à une crise ministérielle : c’est la question du système qui sera adopté pour l’élection des députés. Le scrutin de liste par département sera-t-il maintenu ? reviendra-t-on au scrutin individuel par arrondissement ? Le ministère paraît résolu à soutenir avec énergie ce dernier système ; la gauche et la plus grande partie du centre gauche, c’est-à-dire les groupes les plus nombreux de la majorité du 25 février, se prononcent pour le scrutin de liste. C’est assurément une affaire des plus sérieuses ; mais il faut bien convenir que, par la manière dont elle est traitée, elle perd un peu de sa gravité. C’est un problème politique qu’on ramène aux proportions d’une question d’intérêt de parti et même d’intérêt personnel. La vérité est que, pour la plupart des groupes parlementaires, pour beaucoup de députés et de candidats à la députation, le meilleur système est celui avec lequel on a le plus de chances de succès, et on l’avoue naïvement. De toutes parts, il y a des enquêtes pour savoir où l’on peut réussir, de quels collèges on pourrait disposer, quelles combinaisons seraient possibles selon les divers procédés de scrutin. Les opinions se décident d’après les résultats de l’enquête : ce n’est pas plus difficile que cela de trouver le meilleur régime électoral !

Ce ne sont là après tout que des considérations assez subalternes. La vraie question est de savoir non pas qui réussira, mais quel est le système le plus rationnel, le plus sensé et au point de vue politique le plus prévoyant. Évidemment le scrutin d’arrondissement a l’avantage d’être le procédé d’un régime régulier, et certainement le moyen le plus exact d’arriver à une représentation sincère du pays. Il rapproche le député des électeurs, qui savent du moins à qui ils confient le soin de représenter leurs opinions et leurs intérêts. On redoute la prépondérance excessive des influences locales. Est-ce que ces influences ont jamais empêché des arrondissemens de faire des élections toutes politiques, de nommer des hommes considérables pour leur notoriété, pour les idées qu’ils personnifiaient ? Seulement même dans ce cas, les élections sont toujours moins tumultueuses, moins incohérentes, sans être moins signi-