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fidélité à la constitution. C’est un programme qui n’a certes rien de menaçant et qui de plus est assez net, qui se présente sous des traits précis et saisissables. Est-ce la politique que M. le vice-président du conseil a développée plusieurs fois depuis quelques jours, sur laquelle il est revenu jusqu’au bout avec une énergique obstination en lui donnant le nom d’union conservatrice et en ayant toujours l’air de dire, comme l’ancien duc de Broglie : « Est-ce clair ? »

Non, malgré tous les efforts et peut-être à cause de ces efforts, ce n’est pas trop clair. M. le vice-président du conseil est évidemment persuadé que sa politique est d’une complète netteté, et en effet elle en a tout au moins l’apparence. La parole de M. le ministre de l’intérieur est volontiers tranchante et impérieuse, elle ne redoute pas les affirmations hautaines, et, par une sorte d’entraînement, elle devient aisément provocatrice. Au fond, ce qu’il appelle sa politique n’est qu’un ensemble d’instincts tout négatifs, un appel impatient et désespéré aux anciens partis qu’il s’efforce de rallier aux approches du scrutin. M. Buffet, nous en convenons, n’a depuis quelque temps aucune raison de ménager les bonapartistes, qui lui créent des difficultés, et il a même déclaré lestement l’autre jour qu’il n’était pas leur obligé ; il ne met pas moins un calcul visible dans son langage à leur égard, et ce n’est pas de ce côté que vont ses paroles les plus acerbes. M. le vice-président du conseil se flatte qu’en écartant quelques-uns des chefs les plus compromis, ceux qu’on décore du nom de militans, qui élèvent trop haut le drapeau de l’empire, il pourra rallier le gros de l’armée, ceux qu’il appelle des conservateurs disposés à se rattacher à tous les gouvernemens qui les protègent ; mais c’est là son erreur, c’est là que commence la désastreuse équivoque de sa politique. À quoi veut-il donc rallier ces honnêtes conservateurs de tous les partis sur lesquels il paraît tant compter ? Il leur présente un gouvernement auquel il semble ne pas croire lui-même, dont il s’efforce de dissimuler le nom et de voiler le caractère. La république, il n’en faut pas parler, M. le ministre de l’intérieur ne la connaît que parce que le chef de l’état porte le nom de président de la république. Quant à la constitution, oui sans doute il faut la respecter, puisqu’elle est faite, puisqu’elle est la loi du pays ; après tout cependant, on ne doit pas s’en exagérer l’importance. Ceux qui l’ont le plus étudiée seraient fort embarrassés de dire que « c’est le dernier mot de la sagesse politique. » Peu de publicistes, peu d’hommes d’état, pourraient prévoir « quel sera l’effet dernier de certaines combinaisons de cette constitution. » Attendons l’expérience, bien téméraire serait celui qui oserait affirmer que cette expérience sera favorable à la constitution ! Ce serait a émettre une assertion qu’il serait impossible de justifier. »

Soit, la constitution du 25 février n’est pas flattée : M. le vice-prési-