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révolutionnaires plus ou moins déguisés, des alliés du radicalisme, en un mot de faux modérés suspects et dangereux. Faux modérés sont tous les membres du centre gauche, faux modérés les amis de M. Casimir Perier et tous ceux qui, comme lui, ont aidé sans arrière-pensée à l’organisation d’une république honnête et pacifique. Faux modéré est M. Feray, avec qui M. Léon Say a eu le tort de s’allier, et qui, sans y songer, a été la cause innocente d’une crise ministérielle.

D’exclusion en exclusion, on ne sait plus qui échappera, qui sera jugé assez orthodoxe pour entrer dans cette union des modérés dont M. le président de la république a fait un mot d’ordre politique. Sans y prendre garde, M. Bocher et le préfet de police, M. Léon Renault lui-même, risquent fort de n’être pas dans l’orthodoxie, de ne pas trouver grâce devant l’administration, car enfin que dit M. Bocher à ses électeurs du Calvados ? Il ne dispute à la république constitutionnelle ni son titre ni ses conditions ; il y voit sous un autre nom et sous une autre forme les garanties essentielles du gouvernement parlementaire. « Vous avez à choisir, dit-il, entre les partisans et les adversaires avoués ou cachés du régime actuel, entre ceux qui, conservateurs véritables, l’acceptent de bonne foi et sans arrière-pensée, qui pourront en prévoir le changement sans le désirer, surtout sans le rendre eux-mêmes nécessaire, et ces faux conservateurs qui ne croient pas à la stabilité des nouvelles institutions, en souhaitent la ruine et feront tout pour la précipiter. Je suis avec les premiers. » Que dit de son côté M. le préfet de police en sollicitant la députation dans l’arrondissement de Corbeil ? « Nos nouvelles institutions sont rassurantes pour les conservateurs en même temps qu’elles offrent aux amis des libertés publiques les garanties qu’ils ont le droit d’exiger. Le devoir des bons citoyens est de ne rien épargner pour les consolider… Elles ne peuvent être révisés jusqu’en 1880 que sur l’initiative du président de la république ; si, avant l’expiration du mandat législatif, M. le maréchal de Mac-Mahon croyait devoir faire usage de la prérogative qui lui a été réservée, je voterais pour les propositions qui auraient pour but d’introduire une amélioration ou de corriger un défaut dans la constitution, je repousserais sans hésitation celles qui porteraient atteinte à son principe… » Fort bien ! c’est parler sans détour en homme résolu. Nous ferons seulement observer que ce que dit M. le préfet de police, c’est ni plus ni moins ce qu’a dit le terrible complice de M. Léon Say, M. Feray, qui prêtera certainement son appui à M. Léon Renault dans l’arrondissement de Corbeil, c’est ce que disent dans toutes les parties de la France une foule de candidats combattus par l’administration uniquement parce qu’ils parlent comme M. le préfet de police.

L’erreur de M. le vice-président du conseil est de méconnaître absolument l’immense travail d’apaisement et de modération qui s’accomplit