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dont les amoncellemens de coquillages et d’ossemens on révélé la place aux antiquaires modernes. Les Danois étaient alors à l’âge de pierre ; ils coupaient les viandes et préparaient les peau » avec de grossiers instrumens de silex. Plus tard arrive l’art de travailler les métaux, le bronze d’abord, puis le fer. C’est l’âge héroïque du Nord, l’époque des grands combats et des grands sacrifices dont les runes et les légendes ont conservé les lointains souvenirs. Les hordes diverses de même race qui peuplaient le Danemark et la péninsule suédo-norvégienne luttaient entre elles, avec acharnement, et ces luttes aboutirent à l’intérieur à la formation des trois royaumes actuels, à l’extérieur aux expéditions des Vikings et aux conquêtes des Normands. Chassé par la guerre civile, Gangerolf ou Rollon conquérait la Normandie ; d’autres s’emparaient de l’Angleterre et de la Finlande : d’autres encore lançaient leurs barques audacieuses jusqu’en Islande et en Amérique, C’est aussi l’âge où Thor, Odin et Freya recevaient les hommages des peuples du Nord, où la Walhala s’ouvrait à ces farouches guerriers à qui les dieux ne pouvaient promettre de plus douce récompense que d’éternels combats. La poésie et la musique viennent en aide à l’éloquence du professeur : grâce à elles, l’imagination est plus vivement frappée, et l’esprit subit une impression plus profonde. Le sens musical est si développé chez les Scandinaves qu’après quelques jours d’exercice les jeunes paysans chantent en chœur d’une voix pleine et sonore, en même temps qu’avec un accent de conviction qui séduit. Ils chantent les chansons, cantiques ou ballades que Grcundtvig a composés à la louange des dieux et des hommes de son pays.. Entraînés par cet enthousiasme que fait naître la musique chez ceux qui la comprennent, ils se passionnent pour les héros des légendes nationales, ils se pénètrent de ce passé étrange à qui l’éloignement prête une sorte de sauvage grandeur.

Quand on arrive à l’histoire moderne, ce mode d’enseignement poétique devient d’une application moins facile. On s’étend alors avec complaisance sur la vie publique et privée des Danois aux différens siècles et dans les différentes classes de la société : sans négliger les guerres dont le souvenir peut exciter le patriotisme, on préfère ce genre d’histoire intérieure et intime de la patrie, qui mieux encore que les récits des faits d’armes est de nature à la faire aimer ? on a importé d’Allemagne et acclimaté en Danemark ces leçons d’histoire de la civilisation qui fournissent trop souvent aux savans d’outre-Rhin une occasion d’exposer une foule de faits peu liés et pas toujours intéressans, collectionnés pendant des années de compilation. Inventions, progrès industriels et agricoles, littérature, science, musique, beaux-arts, tout y prend place à son tour. On commence en même temps à inculquer dans l’esprit des