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avec les évêques de Paderborn et d’Osnabruck. « J’espère, disait-il, dans trois ou cinq semaines avoir une belle armée sur pied. » (Archives de la maison d’Orange.) Turenne et Anhalt se mirent enfin en route ensemble et amenèrent à Henri IV cinq mille cinq cents chevaux et 11, 000 hommes de pied. Le roi, qui venait de prendre Noyon, vint au-devant de Turenne et passa la revue des nouvelles levées dans la plaine de Vandy (28 septembre 1591).

Nous n’avons pas à raconter la fin de la guerre civile. Le roi récompensa les services de Turenne en facilitant son mariage avec l’héritière de Henri, duc de Bouillon, et souverain de Sedan ; celle-ci était cousine germaine de Mlle de Nassau. Henri de la Tour prit désormais le nom de duc de Bouillon. La princesse d’Orange profita de la paix pour venir en France : son jeune fils avait été confié à Scaliger et faisait ses études à Leyde. Henri IV traita la princesse avec les plus grands égards ; elle amenait avec elle ses deux belles-filles, devenues pour ainsi dire ses filles, Charlotte et Elisabeth, heureuses d’échanger l’ennui de Middelbourg contre les plaisirs de la première cour du monde. Leur sœur aînée, Louise-Julienne, épousa en 1595 l’électeur palatin. On a une lettre du 5 octobre 1594 adressée par le prince de Condé au comte Maurice, et dans laquelle il recommande le mariage du duc de Bouillon, devenu veuf, avec la comtesse Elisabeth. Louise de Coligny, qui avait retrouvé son héros, fit sans doute tout ce qui était en son pouvoir pour amener ce mariage. La princesse d’Orange dut retourner en Hollande avec les deux jeunes princesses et peu après Henri IV fit demander la main d’Élisabeth pour le duc de Bouillon. Le mariage fut célébré à La Haye le 15 avril 1595.

Devenue Française par son mariage, la jeune duchesse de Bouillon travailla avec la princesse d’Orange à faire faire à sa sœur un mariage français. Cette sœur, aimable, si charmante que le sévère prince Maurice ne l’appelait que « ma belle Brabant » (elle se nommait Charlotte-Brabantine), fixa son choix sur un cousin germain du duc de Bouillon, comme lui protestant, oncle du prince de Condé, Claude de la Trémoille. Le duc de Bouillon demanda pour lui la main de la comtesse Charlotte au comte Jean, le chef de la maison de Nassau. (Lettre du 21 juillet 1597. Archives de la maison de Nassau.) Henri IV eut lieu d’être mécontent que cette demande de mariage fût faite directement ; le duc de Bouillon semblait traiter avec le comte Jean de Nassau comme un prince souverain avec un autre prince souverain. Il parlait, au nom des églises protestantes de France, à un des chefs du parti protestant allemand. Henri IV ne crut pas toutefois devoir faire obstacle au mariage.

La princesse d’Orange saisit avec empressement une nouvelle occasion de retourner en France : cette fois elle amena son fils