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quadrangulaires et le cône pendant, vers la terre ; les tsugas se distinguent par des aiguilles planes comme celles des sapins, avec des cônes pendant comme ceux des épicéas. Si les aiguilles sont courtes dans ces trois genres, elles sont d’autre part nombreuses et persistent ordinairement cinq, six, sept années sur l’arbre. Il en résulte que le feuillage des sapins est abondant et contraste par sa richesse même avec celui des pins ; les branches, multipliées, faibles, garnies de ramules et s’allongeant assez peu, donnent à ces arbres la forme d’une pyramide élancée. Les sapins proprement dits sont représentés par des espèces différentes dans l’Europe centrale, le Caucase, l’Espagne et la Grèce. Le sapin commun et le sapin de Nordmann ou du Caucase ont des aiguilles molles et disposées sur un même plan des deux côtés du rameau ; le sapin d’Espagne ou pinsapo et le sapin de Grèce ou koukounaria ont des aiguilles raides, piquantes et distribuées tout autour des rameaux. L’Asie possède aussi diverses espèces de sapins, particulièrement en Cilicie, dans l’Himalaya, en Sibérie et au Japon. Enfin le nouveau continent produit, entre autres sapins, les espèces les plus grandes, telles que le sapin grandissime et le sapin noble en Californie.

Le sapin commun est désigné par les botanistes sous le nom de sapin pectine, en raison de la disposition des aiguilles placées sur les rameaux comme les dents d’un peigne. On lui donne aussi le nom de sapin argenté, parce que chacune des feuilles porte à la face inférieure deux raies longitudinales d’un gris argenté. Ces deux lignes grises sont formées par les stomates, petites ouvertures par lesquelles l’air extérieur entre en relation avec l’intérieur de la feuille. C’est dans la feuille même du sapin, comme des autres arbres, que l’acide carbonique, en contact avec les cellules vertes, est décomposé sous l’action de la lumière et abandonne à l’arbre le carbone qui en fait la substance fondamentale. On donne aussi au sapin pectine le nom de sap, encore tout voisin du latin abies, divers noms locaux, tels que celui de sapin des Vosges, et en allemand le nom de weisstanne, sapin blanc, à cause de son écorce blanchâtre et pour le distinguer de l’épicéa (rothtanne), dont l’écorce est rougeâtre. Le sapin pectine est répandu dans les Pyrénées, les monts d’Auvergne, les Cévennes, les Alpes, le Jura, les Vosges et toutes les montagnes qui entourent le bassin du Danube. C’est exclusivement un arbre de montagne ; il ne descend pas dans les plaines, sauf quelques exceptions qui semblent confirmer la règle. Il ne s’étend pas vers le nord au-delà de Dresde, et Jules-César a déjà constaté qu’il fait défaut dans la Grande-Bretagne. Le bois connu dans le commerce sous le nom de sapin du Nord n’est pas du sapin, c’est de l’épicéa ou du pin.