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donnait pas son dernier mot, et que la composition définitive de la flotte dépendrait beaucoup des études, de l’expérience et des circonstances.

La chambre avait renouvelé un vœu plusieurs fois exprimé. C’était de voir l’industrie nationale exclusivement chargée de construire désormais, de concert avec l’état, les bâtimens de la flotte. Les 3 premières frégates cuirassées sortaient des chantiers anglais. Plusieurs corvettes avaient été construites et d’autres achetées au dehors. L’une des meilleures provenait du Danemark, où elle avait été capturée pendant la guerre. La Prusse ne s’était pas d’abord trouvée en mesure de se passer du concours des étrangers. Cette dépendance inquiétait la majorité de l’assemblée et blessait l’amour-propre de la nation. M. de Bismarck tenait compte de ce sentiment et annonçait l’intention de réserver désormais à l’industrie du pays tout ce que l’état n’exécuterait pas directement. Il y a dans la Baltique des ateliers, à Dantzig et près de Stettin. Les premiers appartiennent au gouvernement ; M. de Bismarck comprenait dans son projet un crédit de 12 millions de francs pour l’agrandissement de cet arsenal de rang inférieur. Les seconds appartiennent à l’industrie privée et sont placés au nord de Stettin, en un endroit où l’Oder a 6 mètres d’eau. La société qui les exploite se fait remarquer par son activité, qui lui a valu des commandes non-seulement du gouvernement prussien, mais de la Russie et d’autres états. Cette compagnie industrielle, appelée Compagnie de Vulcain, n’avait pas attendu les promesses contenues dans le rapport de M. de Bismarck pour compléter son outillage et l’adapter à la construction des grands bâtimens. Ceux-ci, devant être armés dans les arsenaux militaires, ne sont pas assez chargés, au sortir des chantiers, pour ne pas flotter dans l’Oder, près de son embouchure. La Société de Vulcain a donc reçu la commande de la frégate Borussia, qui est aujourd’hui construite et qui a été lancée en présence du prince royal, de la princesse sa femme, fille de la reine d’Angleterre, et de leurs enfans. La princesse a été la marraine de ce nouvel ce homme de guerre, » et elle a changé son premier nom Borussia en celui de Preussen.

M. de Bismarck, fidèle à sa promesse, a confié en outre aux chantiers de Dantzig la construction d’une grande corvette cuirassée, qu’on peut mettre au rang de frégate, la Hansa, Le chancelier de l’empire n’a pas cédé seulement à la pression d’un sentiment public qu’il est homme à dédaigner et à étouffer s’il en était gêné ; il a été séduit par la perspective de créer, en face de Kiel, à l’autre extrémité de la Baltique, un second port pour la réparation et le ravitaillement des navires de guerre. Il a consenti d’ailleurs à en donner les raisons. « Le port de Kiel, a-t-il dit en substance,