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LA
BOSNIE ET L’HERZEGOVINE
PENDANT L’INSURRECTION
SOUVENIRS DE VOYAGE.[1]

Avant de rechercher le véritable caractère de l’insurrection des provinces slaves de la Turquie d’Europe et de dire les péripéties de la lutte, il faut en déterminer les causes réelles. Si, comme l’affirment les notes communiquées à la Sublime-Porte à la suite de l’accord des trois puissances, le soulèvement qui a éclaté en Bosnie et en Herzégovine, et qui a envahi la Bulgarie, est dû à la situation précaire des sujets chrétiens des deux provinces, aux impôts dont on les écrase, aux vexations constantes dont ils sont l’objet de la part des begs propriétaires du sol et des fermiers de la dîme, au déni de justice des tribunaux musulmans et aux restrictions apportées dans l’exercice du culte, quelle est donc en réalité la situation du raïa, au point de vue social comme sujet du sultan, au point de vue économique comme colon dépendant des begs, au point de vue de sa foi comme chrétien ? En principe, les rescrits impériaux de 1831, de 1839, de 1852, de 1858 et de 1862 ont octroyé des réformes considérables ; seraient-elles restées à l’état de lettre morte, puisque les griefs dont les cabinets de l’Europe se sont faits les interprètes sont encore les mêmes que ceux qu’on invoquait lors des insurrections précédentes ?

Pour répondre à ces questions il est nécessaire de savoir quelles sont les origines des classes qui composent la population des provinces nord de l’empire ottoman, et, si le mouvement est à la fois

  1. Voyez la Revue du 1er mars et du 1er mai.