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de la commune au 2 décembre ? Veut-il étendre le verdict dont il frappe le 2 décembre à la commune ? On n’y voit plus trop clair. Que M. Victor Hugo condamne le 2 décembre, qu’il réveille la conscience publique, si elle pouvait s’endormir devant ces audacieuses violations de la loi, soit, c’est justice ; mais il oublie que, s’il a été une des victimes du coup d’état, il avait été un des plus chauds patrons de celui qui devait le faire, et il y a des personnes, séparées de M. Victor Hugo aujourd’hui comme alors, qui se souviennent d’avoir encouru ses reproches parce qu’elles manquaient d’enthousiasme pour le prince, pour le grand nom. Et notez bien que M. Victor Hugo ne faisait pas comme d’autres, qui acceptaient la candidature du prince Louis Bonaparte par résignation, en s’efforçant d’atténuer ce qu’elle pouvait avoir d’inquiétant ; il la soutenait, lui, pour ce qu’elle avait de périlleux, pour les traditions napoléoniennes, pour les foudres et les éclairs, pour le titanique, pour la colonne, — c’est-à-dire pour tout ce qui était déjà l’empire. C’est fort bien d’appeler le dernier empereur « récidiviste, » de rappeler ses anciennes équipées : est-ce qu’il n’avait pas commis Strasbourg et Boulogne lorsque M. Victor Hugo le soutenait en 1868 ?

Cela veut dire, si nous ne nous trompons, que les antithèses ne servent à rien et n’expliquent rien, qu’il faudrait d’abord avoir montré un peu de jugement, un peu de prévoyance avant les événemens, pour garder le droit d’être sévère quand ils sont arrivés. M. Victor Hugo a pu étonner ou même intéresser le sénat par les ressources de sa parole ; il a trouvé la mesure de son crédit, de son autorité, dans les cinq voix qu’il a obtenues, — six voix en comptant la sienne. Voilà donc une question unie, elle est ensevelie sous les discours de M. Victor Hugo et de M. Raspail, elle a disparu devant l’énergique et forte raison de M. le garde des sceaux, qui lui a porté le dernier coup. Ce qu’il y a de mieux à faire maintenant, c’est de laisser intact l’effet politique du vote parlementaire, de ne pas s’exposer à le compromettre, à l’atténuer par des propositions subtiles ou équivoques, qui ont toujours l’air de remettre en doute ce qui a été décidé. Les chambres ont fait leur œuvre ; le gouvernement n’a pas besoin de motions nouvelles pour remplir le devoir dont le vote parlementaire et ses prérogatives constitutionnelles lui tracent la mesure.

Une autre discussion qui a bien fini, qui pouvait par certains côtés être périlleuse ou tout au moins délicate, c’est celle qui s’est engagée l’autre jour au sujet de toutes ces questions de la politique nouvelle, des circulaires du ministère de l’intérieur, des changemens de maires, de l’interprétation de l’article de la constitution relatif à la révision. Le regrettable M. Ricard était allé un peu loin dans une de ses circulaires en parlant sans distinction des « espérances factieuses » des partis, surtout en employant un langage assez vague pour que des convictions honnêtes pussent se croire atteintes et même pour que le droit de