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part. Le pain et la viande, dont l’abondance et le bon marché leur importent tant, sont complètement affranchis de droits. Même un droit de balance, qu’on percevait sur les céréales après la réforme, a été aboli. Au lieu d’un tarif des douanes compliqué et hérissé de taxes élevées et de formalités gênantes, il y en a un autre où tout droit protecteur a disparu et où il ne reste plus que six ou sept droits fiscaux qui atteignent des denrées exotiques, telles que le thé, le café, le cacao, un ou deux fruits sucrés que le pays ne récolte pas, le tabac, dont la culture est interdite, le vin, à la production duquel se refuse le climat de l’Angleterre, et les boissons alcooliques, considérées comme une matière imposable par excellence, sur laquelle on frappe également, qu’elle soit indigène ou étrangère. Le nombre des articles ainsi taxés est restreint à ce point, que le tarif des douanes tient facilement sur un carré de papier grand comme la paume de la main. Le sucre même n’y figure plus. Un des derniers actes du cabinet Gladstone a été de traiter comme une denrée alimentaire de première nécessité, et en conséquence d’affranchir d’impôt ce produit, regardé naguère comme un objet de luxe, et qui à ce titre subissait une grosse contribution.

Les droits d’exportation ont disparu ; il en existait de remarquables, entre autres sur le charbon et sur les machines. Par ce dernier, on s’était proposé d’enrayer les progrès des manufactures étrangères. Le budget britannique ne connaît plus de déficit ; on n’y voit guère plus que des excédans qui servent à amortir la dette publique ou à motiver des dégrèvemens nouveaux. Presque chaque année, à partir de 1842, quelques-unes des taxes ont été diminuées ou supprimées. Par les facilités nouvelles que recevait le travail national, et parmi lesquelles il faut compter ces allégemens, la richesse de la société grandissait assez pour que le budget des recettes n’y perdît rien. La suppression de quelques détaxes dont jouissaient quelques parties du territoire a pu y contribuer ; quelques taxes nouvelles, légitimées par la nature des choses, et spécialement l’impôt sur le revenu, y ont aidé aussi, mais le relèvement remarquable et constant des recettes après que des réductions avaient été opérées dans les tarifs de la taxation, ou après l’abolition complète de divers impôts, provient avant tout de ce que le travail national, plus libre et plus fortement stimulé par la concurrence étrangère, a produit toujours davantage, et le niveau de la richesse de la société a monté à mesure que grandissait la puissance productive. Quand les contribuables sont plus riches, ils paient davantage au fisc, le taux des impôts restant le même, parce qu’ils consomment une plus forte quantité des articles imposés, et qu’ils multiplient les transactions sur lesquelles l’état