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agréablement à l’œil, mais qui dans la pratique s’est toujours montré défectueux. Dans les momens de grande cherté, il a, l’expérience l’a trop prouvé, une influence funeste. En 1845, on fit, au sujet des graines oléagineuses, une loi qui en soumettait l’importation à de nouvelles rigueurs.

De la révolution de 1848 sortit, après un petit nombre d’années d’agitation, le second empire. Le chef de l’état fut investi par la constitution impériale du pouvoir de rendre exécutoires les traités de commerce sans demander la sanction des chambres, pouvoir sommaire dont il est juste de dire qu’il n’en fut usé qu’après qu’on eut essayé vainement d’obtenir la réforme par la voie législative. Après l’exposition universelle de Paris de 1855, le gouvernement présenta un projet de loi pour l’abolition générale des innombrables prohibitions qui déshonoraient notre tarif. L’accueil fait à ce projet par le corps législatif fut si malveillant, si passionné, malgré l’élévation des droits qui auraient remplacé les prohibitions, qu’on dut le retirer ; mais l’avis fut donné par le Moniteur, le 17 octobre 1856, que la prohibition n’avait plus que cinq ans à vivre. En effet, en janvier 1860, l’empereur, recourant à la faculté suprême qu’il tenait de la constitution, signa avec l’Angleterre le traité de commerce qui ne fut mis en pratique à l’égard des marchandises prohibées qu’en 1861 ; cependant l’application fut immédiate pour les articles non prohibés, les fers et les charbons par exemple. Fait capital, à cette occasion le gouvernement déclara que la liberté des échanges était la base de sa politique commerciale. Antérieurement l’empereur avait modifié profondément par des décrets provisoires les lois restrictives de la restauration dirigées contre les denrées alimentaires et les matières premières d’origine agricole. Il avait réduit les droits sur les fers de toute sorte.

Si l’on compare ce qu’a pu être le mouvement ascendant de la richesse nationale pendant trois intervalles à peu près égaux entre lesquels se partagent les soixante années écoulées depuis le rétablissement de la paix générale en 1815, à savoir la restauration, le gouvernement de juillet et le second empire, il n’est personne aujourd’hui qui ne reconnaisse que l’accroissement le plus marqué appartient à la troisième époque, et surtout à l’intervalle de dix années qui a le traité de commerce avec l’Angleterre pour point de départ.

Sans la forte impulsion qui avait été imprimée au travail national, à la puissance productive du pays, et par conséquent à sa puissance d’épargne par les traités de commerce et par les mesures sages et libérales d’outils furent accompagnés et suivis, nous eussions été hors d’état de supporter le lourd fardeau légué par la fatale guerre de 1870-71. Depuis ce cruel désastre, la situation de la