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organe du gouvernement, fait au sujet de l’intervention de l’état dans le monnayage une distinction et des réserves qui nous semblent justes et opportunes. Il croit que, d’une manière générale, l’état est investi du droit qu’ont les particuliers d’envoyer aux hôtels des monnaies les matières d’or et d’argent dont ils peuvent être les possesseurs, pour qu’on les leur rende sous la forme d’espèces monnayées. Il a rappelé que le gouvernement en avait usé dans d’autres temps sans que personne en fît le sujet d’une critique. Ce droit général du gouvernement qu’a réclamé le ministre n’est pas douteux. Nous partageons aussi son opinion sur ce point, que dans la circonstance présente il ne convient point de s’en servir. Il en a donné une raison qui nous semble excellente, à savoir que dans un cas tel que celui d’aujourd’hui, le gouvernement ne doit pas être l’artisan de la multiplication de ces compromettantes pièces de 5 francs d’argent dans le pays.

M. de Parieu n’a pas été le seul à se déclarer en faveur de la fabrication au compte de l’état des pièces de 5 francs pendant la suspension du monnayage pour le compte des particuliers ; deux autres sénateurs, M. de Ventavon, jurisconsulte distingué, et M. Hervé de Saisy, qui pourtant s’est montré versé dans la matière des monnaies, ont proposé que l’état fit frapper de ces pièces désormais à l’exclusion des particuliers ; mais leurs amendemens ont été repoussés. La pratique de deux gouvernemens, l’un et l’autre membres de l’union latine, fournissait un précédent de nature à faire impression, mais qui ne méritait pas de faire loi. Ces deux gouvernemens aujourd’hui font monnayer des lingots d’argent en pièces de 5 francs dans la limite fixée, pour chacun des états de l’union, par une conférence annuelle. Dans le principe, chacun des états de l’union était libre de fabriquer en monnaie d’or et d’argent tout ce qui lui plaisait ; mais depuis 1873, la monnaie d’argent étant, par la dépréciation du métal, sujette à caution à cause du bénéfice toujours croissant et non justifié qu’elle procure, les différens états de l’union latine sont convenus d’en limiter la fabrication[1]. De là les conférences annuelles où l’on détermine le lot de chacun. Les deux gouvernemens belge et italien excluent les particuliers de toute participation à ce monnayage, afin que l’état seul en recueille tout le fruit, qui présentement est fort séduisant : pour chaque million qu’ils frappent, c’est, au cours actuel des lingots d’argent, de 200,000 à 250,000 francs, — belle mine à exploiter, on le voit. Mais, il faut le dire, l’opération est d’une probité problématique. L’émission des monnaies d’argent sur le pied ancien de 25 grammes au titre de

  1. Par des raisons faciles à concevoir, le billon d’argent, qui est reçu dans tous les états de l’union latine, a été dès l’origine de l’union soumis à une limitation qui dépendait du chiffre de la population.