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ambitieux ou trop vastes. Notre affaire n’est pas d’écrire des dissertations de philosophie ou de morale, ni des pages d’esthétique ; la critique littéraire n’est pas. non plus de notre domaine, ni les impressions de voyage, ni la politique contemporaine, mais nos jeunes érudits entreprendront utilement de recueillir, de coordonner et de commenter, avec le secours des textes classiques, les inscriptions relatives à un ordre de magistrats ou de prêtres romains, aux cohortes prétoriennes, aux cohortes urbaines, à telle légion, à tel grade de l’armée romaine, à un collège funéraire, à un collège industriel, à une classe d’appariteurs, à telle institution, à telle dignité de la république ou de l’empire. Bien dresser de tels catalogues, c’est faire œuvre d’exactitude scrupuleuse et de précision. Il faut copier les inscriptions soi-même, non pas seulement d’après les recueils imprimés ou manuscrits, mais en les relevant autant que possible sur la pierre et le marbre ; il faut apprendre à les lire, à les compléter, à les dater soit d’après les indications qu’elles contiennent, soit d’après l’âge des caractères et de la langue, soit d’après l’histoire des monumens qui en sont revêtus. Il sera d’un grand intérêt d’étudier les représentations figurées relatives à un mythe particulier des religions grecque et romaine, aux banquets funèbre, par exemple ou au mythe de Psyché. On peut observer, toujours en s’aidant des textes en même temps que des images, les attributs et l’histoire d’une divinité, d’un demi-dieu, d’un héros. On peut entreprendre le classement des innombrables inscriptions funéraires, parmi lesquelles s’établissent aisément des catégories et des subdivisions. Rien qu’à construire de tels catalogues raisonnes, l’œil s’habitue à reconnaître, et à identifier les formes ; l’éducation de l’antiquaire se fait, du même coup celle de l’épigraphiste, et aussi celle du littérateur et de l’historien, car, chemin faisant, on a pénétré au cœur de l’ancien monde, on a saisi pour la première fois le sens vrai de tel mot technique, de telle expression consacrée, de telle pensée familière à laquelle écrivains et poètes faisaient des allusions pour nous seuls obscures.

Voilà ce qu’on peut faire en se servant des inscriptions connues et publiées ; mais nous ne renonçons pas à enrichir nous-mêmes la science de monumens inédits. Il suffit pour cela, sans parler des fouilles possibles, d’observer avec un œil et un esprit exercés une province quelconque de la presqu’île italienne. J’oserai à peine conseiller à notre école naissante de s’attaquer déjà aux mystères que nous ont légués les Étrusques. C’est toutefois un Français, M. Noël Desvergers, qui a découvert une des plus célèbres de leurs tombes peintes ; c’est lui, avec Alessandro François, qui a tenté d’entamer le vaste tumulus de la Cucumella ; en ce moment encore, nos savans n’abandonnent pas à M. le comte Conestabile,