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assurer aux différentes classes du clergé un traitement fixe, et affecter l’excédant aux écoles nationales. Néanmoins en 1870 il ne vota qu’une enquête ; cette réforme ne fut définitivement accomplie que dans la session de 1871. La gestion des biens ecclésiastiques fut confiée à un comité qui devait en tenir le budget. D’autre part, l’assemblée créa deux écoles normales primaires[1]. Ainsi, sous le nom de Congrès national ecclésiastique, les Serbes ont une sorte de parlement qui, s’il doit s’abstenir des questions politiques, a dans son domaine toutes les questions ecclésiastiques et scolaires. L’élément laïque le compose pour les deux tiers et possède ainsi la part principale dans l’administration de l’église nationale et des biens ecclésiastiques. Le congrès du reste est à bien des égards dans la dépendance du gouvernement hongrois, sans l’autorisation duquel il ne peut se réunir et dont l’approbation est indispensable à ses résolutions. Le gouvernement, par mesure de surveillance, a également le droit de se faire représenter dans cette assemblée par un commissaire spécial. Depuis 1874, l’empereur-roi s’est attribué le droit de ne pas ratifier l’élection du patriarche et de demander un nouveau choix au congrès.

La suppression des confins militaires terminera notre histoire politique des Serbes de Hongrie. Cette organisation était certainement surannée, bien qu’une institution analogue se conserve encore dans un des états les plus civilisés de l’Europe, l’armée de l’Indelta en Suède ; mais en Hongrie cet embrigadement d’une population entière, soumise en toute chose à l’autorité militaire, se compliquait du communisme traditionnel des Slaves du sud. L’individu ne possédait rien en propre, la zadrouga ou communauté de famille (plus exactement de familles) était seule propriétaire. Pourtant la diète et le gouvernement de la Hongrie s’inquiétaient moins de voir subsister un ordre social suranné que de voir les confins indépendans du royaume de la Hongrie : les rendre à la vie civile, c’était les annexer aux comitats hongrois, c’était agrandir la Hongrie. Les régimens des confins de la région croate slavonne furent annexés aux comitats du royaume de Croatie et de Slavonie et ainsi rattachés à leur propre race ; mais les régimens de la région proprement hongroise (Batchka et banat) furent annexés aux comitats hongrois et passèrent du militarisme germanique à la magyarisation. Aussi, malgré les bienfaits de ce changement de régime et malgré les heureuses conséquences de cette réforme au point de vue civil et social, n’est-ce pas sans mécontentement et sans pétitions à

  1. Il semblera étrange en Occident que cette assemblée, dont le nom officiel est « congrès ecclésiastique, » ait voté pour le théâtre serbe de Novi-Sad une subvention annuelle de 3,000 florins. Ce vote, n’ayant pas été ratifié par le gouvernement, est resté sans effet.