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tribus au profit des principaux rameaux du groupe aryen n’atteindra jamais, suivant toute probabilité, les branchés supérieures de la race jaune.

S’il est malaisé de déterminer les peuples qui paraissent devoir l’emporter dans la lutte suprême que se livrent les races pour se disputer la possession du globe, il n’est pas moins difficile d’évaluer le chiffre qu’atteindra la population humaine quand elle sera arrivée à l’apogée de son épanouissement. Nous avons dit que les terres émergées jusqu’ici présentent une surface d’environ 14 milliards d’hectares pouvant alimenter 14 milliards d’individus à raison d’un habitant par hectare. Les termes de ce rapport variant avec les âges géologiques, on ne saurait établir sur de telles bases que des calculs approximatifs. L’étude des couches du sol nous montre que la distribution des eaux et des continens se modifie d’âge en âge suivant une loi constante : d’une faible étendue à l’origine, les terres ont gagné progressivement en surface, tandis que les océans se sont retirés par une marche inverse. Ce double mouvement va toujours se continuant, bien qu’il échappe à l’observation directe, comme tant d’autres phénomènes cosmiques, par suite de la lenteur avec laquelle agissent les forces qui les produisent. De nouvelles îles, de nouvelles assises continentales s’ajouteront à celles qui sont déjà formées, offrant ainsi un plus grand espace au développement de notre espèce ; mais cette émergence de nouvelles terres, ne pouvant s’opérer sans un retrait proportionnel de la surface des mers, sera suivie d’un ralentissement dans l’activité productrice du globe. La végétation, dont l’eau constitue l’élément essentiel, s’alanguira à mesure que les océans cesseront de répandre dans l’atmosphère les vapeurs qui fertilisent le sol. D’un autre côté, les découvertes récentes de la science ont révélé un fait depuis longtemps soupçonné, le refroidissement du soleil. La chaleur de cet astre, qui forme le facteur initial de la vie des plantes, s’affaiblissant à la longue, retardera le jeu des forces organiques et arrêtera du même coup l’essor de la population. Le chiffre de 14 milliards, qui représente le nombre d’habitans que nourrirait aujourd’hui la terre, si elle était cultivée dans toutes ses parties, ne doit donc être considéré que comme une limite qu’on ne pourra jamais atteindre ni même approcher que de loin. En effet, les obstacles qui ont empêché jusqu’ici les races fortes et prolifiques de coloniser les zones habitables pourront être supprimés en partie, mais, suivant toute probabilité, ne le seront jamais complètement. D’autre part, si on compare la végétation de l’époque actuelle à celle de l’époque tertiaire, qui permettait à la flore des tropiques de s’épanouir jusque dans les régions boréales, si on rapproché également les espèces animales d’aujourd’hui des gigantesques mammifères qui