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régionales : on les nommait jadis impériales ; on les nomme nationales à présent, et ces dénominations ont en tout cas le mérite de ne point mentir à la réalité.

Le législateur, on le voit, ne faisait guère que définir, régler et généraliser les types d’institutions dès longtemps en vigueur ; il les sanctionnait et étendait à toute la France ce qui n’existait encore qu’en quelques points isolés. Il attribuait enfin au nouvel enseignement d’abondans subsides : 2,500,000 francs pour l’exercice 1849. Mais la partie la plus remarquable et vraiment originale de son œuvre était la création de cet institut agronomique qui devait être « l’école normale supérieure de l’agriculture. » Il l’installait à Versailles, dans des conditions uniques. On avait là, sous la main, de vastes bâtimens et un parc de 1,463 hectares contenant trois fermes importantes[1]. « Dans ces fermes, disait le directeur des cultures, M. Lecouteux, on trouve des terres à seigle et des terres à blé, des terres fortes et des terres légères, des terres calcaires et non calcaires, des terres sèches et des terres humides, des terres labourables faciles et difficiles à travailler, des terres d’une grande puissance herbifère, » tous les sols, par conséquent, qui pouvaient donner l’enseignement le plus complet. « Le parc, ajoute M. de Dampierre, contenait encore des eaux qui pouvaient servir à l’organisation d’une école d’irrigation et permettre la transformation de centaines d’hectares en prairies arrosées, qui favoriseraient l’élevage de nombreux animaux ; des pépinières parfaitement organisées ; 465 hectares de beaux bois pour les sylviculteurs, un potager connu dans le monde entier pour servir d’école d’arboriculture. Tout cela venait de tomber de la liste civile du roi Louis-Philippe dans le domaine de l’état et s’offrait de soi-même : la tentation fut trop forte, on y succomba… » C’était une faute grave ; elle a pesé lourdement sur l’institut et sur tout l’enseignement agricole. Cette exploitation était beaucoup trop étendue ; on se trouvait entraîné, pour l’approprier à sa destination nouvelle, en des dépenses exagérées. Les fermes furent montées sur un pied magnifique ; on y réunit les animaux les plus remarquables, les collections les plus rares. Cela était admirable, mais ne servait guère, car les cours, les travaux théoriques devaient absorber presque tout le temps des professeurs et des élèves. Et quand l’institut s’ouvrit, en novembre 1850, plus d’un million avait été dépensé pour la seule installation du domaine : il avait fallu que le ministre d’alors, M. Dumas, recourût à des viremens pour trouver 500,000 fr.,

  1. La Ménagerie, Satory et Gally-Chèvreloup (voyez l’arrêté des 19-28 décembre 1848, portant désignation des parties du domaine national de Versailles affectées à l’Institut agronomique).