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l’insuffisance de la charité publique. L’on ne compte pas dans le département de la Seine, et suivant une énumération probablement incomplète, moins, de 68 orphelinats qui reçoivent des enfans de tous les âges. Sur ces orphelinats, 6 sont ouverts aux enfans des deux sexes, 8 aux garçons et 54 aux filles. Une inégalité aussi frappante s’explique par le fait que ces orphelinats sont presque toujours tenus par des congrégations religieuses, et que le personnel nombreux des ordres féminins permet de multiplier les orphelinats pour les filles. Aussi le chiffre des garçons orphelins qui tombent à la charge de l’Assistance publique est-il tous les ans sensiblement plus élevé que celui des filles orphelines, recueillies en plus grand nombre dans les établissemens charitables. Nos édiles parisiens, qui sont si hostiles aux congrégations religieuses, et qui les poursuivent de leur malveillance, ne se sont jamais avisés de l’économie dont sur ce point ils leur sont redevables.

Ce serait demeurer incomplet dans l’énumération des mesures qui sont dictées à la charité publique ou privée par la préoccupation du sort des enfans abandonnés, que de laisser de côté les œuvres ou les institutions qui ont pour but de venir en aide à la mère au moment de sa délivrance, car les secours accordés à la mère profitent directement à l’enfant en le préservant de cette misère des premiers jours, qui est une des causes de l’abandon. Au premier rang de ces œuvres, on compte cette grande société de charité maternelle, dont la fondation remonte à 1788, et qui est devenue presqu’une œuvre historique. Cette société compte un comité par arrondissement et secourt annuellement à domicile un grand nombre de mères indigentes. Dans des proportions. plus modestes, l’Association des mères de famille rend à la population pauvre les mêmes services ; mais ces œuvres ne distribuent des secours qu’aux femmes mariées. Il est vrai que la maison d’accouchement dite la Maternité et l’hôpital des cliniques offrent un asile gratuit à toute femme qui est sur le point de mettre un enfant au monde ; mais que deviendront les filles-mères qui, venues, à Paris pour cacher leur grossesse ou ayant perdu leur place à la suite de leur faute, attendent pendant deux ou trois mois sur le pavé de Paris l’instant de leur délivrance ? Que deviendront-elles, lorsqu’à peine remises de leurs couches, trop faibles pour trouver encore de l’ouvrage, elles ont cependant à subvenir, non pas seulement à leurs besoins, mais à ceux de leur enfant placé en nourrice ? Aux unes l’asile Sainte-Madeleine, aux autres l’asile Gérando ouvrent en silence et dans l’ombre la porte d’un refuge discret.

En résumé, si de toutes les misères qui assaillent l’enfance à Paris, l’abandon est celle à laquelle il faut pourvoir tout d’abord