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Comment la chambre des pairs n’aurai t-elle pas eu, à l’égard des lois qui fixaient le montant des dépenses et des recettes, les droits qu’elle exerçait sur les lois qui régularisaient l’emploi des deniers publics? Par suite des événemens politiques, le budget de 1831 dut être profondément remanié et ne put être présenté aux chambres qu’en octobre 1831. Le gouvernement avait dû, à deux reprises, se faire autoriser à percevoir des douzièmes provisoires. Le rapporteur du budget à la chambre des pairs, M. le comte Roy, présenta, au nom de la commission, des observations sur trois des articles du budget des dépenses, et fit remarquer que, la chambre des députés étant encore réunie, la chambre haute pouvait user de son droit d’amendement sans appréhender de porter préjudice à l’expédition des affaires. Deux des articles critiqués par la commission furent néanmoins votés; mais l’article 7, combattu par le comte de Tournon et par le comte Molé, fut rejeté. Le budget des dépenses dut retourner à la chambre des députés, qui accepta, à une majorité considérable, le rejet de cet article.

Ce fait, qui constate le droit de la chambre des pairs, nous a paru mériter d’autant plus d’être signalé qu’il a échappé à plusieurs des hommes les plus familiers avec notre histoire parlementaire, et qu’il a été perdu de vue par un des ministres de la monarchie de juillet, dans une discussion dont il sera question tout à l’heure. Venons à un fait qui ne mérite pas moins d’attention, en raison des analogies qu’il présente avec l’incident qui a donné naissance à la controverse actuelle. Dans la première période de la monarchie de juillet, la chambre des députés renfermait une fraction assez nombreuse, composée de toute la gauche et d’une partie du centre gauche, qui se montrait hostile à l’église catholique. Elle n’avait pu empêcher le maintien dans la charte de l’article 6, qui mettait à la charge de l’état l’entretien des ministres des cultes chrétiens : elle essayait d’atteindre son but par la voie détournée d’amendemens au budget. Dans la session de 1833, la chambre des députés, discutant le budget de 1834, eut à repousser pour la troisième fois divers amendemens présentés ou appuyés par MM. Luneau, Isambert et Salverte, et qui avaient pour objet : de mettre à la charge des départemens les frais des tournées diocésaines, de réduire de 100,000 fr. le crédit relatif aux bourses des séminaires, de réduire de 300,000 francs le crédit affecté à l’entretien des édifices diocésains, de supprimer toute subvention aux établissemens ecclésiastiques. On mit en discussion un amendement de M. Eschassériaux. Une commission de la chambre avait exprimé, en 1831, l’opinion que le nombre des diocèses épiscopaux, porté à 80 par une loi de 1821, fût ramené au chiffre de 68, fixé par le concordat de 1801, Le ministère avait promis d’ouvrir à cet effet des négociations