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en déclarant que « ce qui avait été fait en 1821 avait été régulièrement et légalement fait. »


« Assurément, ajouta-t-il, c’est un tort que cette déviation des principes; mais le gouvernement de la restauration n’a-t-il pas continuellement dévié des principes, surtout vis-à-vis du clergé?.. Il faut reconnaître que, dans l’espèce, c’est régulièrement et légalement que la chose s’est faite, et la seule leçon que vous puissiez et que vous deviez en tirer, ce n’est pas de casser violemment ce qui a été fait légalement, c’est de ne rien faire de semblable à l’avenir, c’est que chacun soit jaloux de ses prérogatives et ne délègue pas son autorité à un autre. »


L’amendement de M. Eschassériaux fut adopté par assis et levé à une faible majorité, après une première épreuve douteuse. La gauche de la chambre des députés manifesta sa satisfaction de ce résultat imprévu; mais tous les regards se tournèrent aussitôt vers la chambre des pairs, et la suppression de l’article additionnel ne fit doute pour personne. Ce vote aurait eu pour conséquence de nécessiter une nouvelle délibération de la chambre des députés et d’entraîner une prolongation de la session et un retard dans la promulgation de la loi de finances. Le ministère, qui croyait avoir intérêt à une prompte clôture de la session, intervint auprès de la chambre des pairs pour prévenir le vote que tout le monde prévoyait, et il n’hésita pas à prendre des engagemens formels vis-à-vis d’elle pour la déterminer à ne pas user de sa prérogative. En présentant, le 18 juin, le budget des dépenses à la chambre, le ministre des finances, M. Humann, analysa suivant l’usage le projet de loi tel qu’il avait été présenté par le gouvernement, et passa en revue les modifications que la chambre élective y avait apportées. Arrivant à l’article additionnel de M. Eschassériaux, le ministre déclara nettement que cette disposition ne pourrait recevoir son exécution qu’au prix d’une atteinte à la prérogative royale, au respect de la loi, à la charte et à la liberté des cultes; il demandait néanmoins à la chambre de ne pas l’effacer du budget :


« Heureusement, messieurs, disait le ministre, l’article dont il s’agit n’est point d’une application immédiate. C’est une disposition conditionnelle qui, nous l’espérons, ne rencontrera pas, d’ici à votre prochaine réunion, les cas qu’elle suppose. A tout événement, le roi nommera aux sièges qui viendraient à vaquer, sauf la question du traitement, qui sera remise en discussion à la session prochaine (très bien). Nous ne doutons pas que la chambre des députés, frappée de la gravité de la mesure, ne revienne à la décision qu’elle avait prise trois fois, depuis la révolution de juillet, dans un sens tout opposé à l’article dont j’ai l’honneur de vous entretenir.