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l’électeur palatin. Celui-ci avait épousé Louise-Julienne, une des filles de Guillaume le Taciturne et de Charlotte de Bourbon, la sœur de la duchesse de Bouillon. L’électrice avait emmené à Heidelberg sa plus jeune sœur Amélie. Bouillon donne à sa femme des détails minutieux sur le ménage de sa belle-sœur : il la montre « tout à admirer, » unie par la tendre affection à l’électeur, avec six enfans, trois fils et trois filles, tous jeunes, les petites princesses « ayant déjà leurs grâces et cérémonies toutes formées ainsi que les plus grandes les savaient avoir » ; il peint Mlle d’Orange habillée à la française (Mme l’Électrice à l’allemande), et la marie en espoir à « ung de nos seigneurs de la religion[1]. »

Arrivant à ses propres affaires, il dit : « la royne d’Angleterre a escrit au roy ainsi que je l’usse sceu désirer, sans qu’elle aye eu de ma part informassion ny pruve de quelque chose. Je croy avoir bientost des nouvelles de Holande. Je escrit seullement à Mme votre belle-mère (Louise de Coligny), n’avant voulu escrire à personne plus que je ne voye quel changement portera la despesche que je fis par Bourron de Genesve. »

La cour d’Heidelberg était grande, on y voyait des princes, ambassadeurs du roi et de l’empereur ; « de grandes affaires s’y trestent, auquelles je sers, dit Bouillon, pour avancer ce qui est juste et à l’honneur de Dieu. » Cette longue lettre d’Heidelberg, où tous les tons se mêlent, finit ainsi : « Les points d’estat sont aujourd’hui si délicats que j’y n’y puis pesnétrer ; Dieu le sçait et connaît les hommes et a les cœurs des rois dans sa main sous sa sauvegarde. Je vous recommande et le supplie qu’il continue à m’y tenir pour servir à sa gloire, et que nous et notre postérité y soyons tellement consacrés que nos jours finissans, nous le glorifions de toutes nos forces » (Heidelberg, 15 février 1603).

Catherine Belgique, une autre fille de Charlotte de Bourbon et de Guillaume le Taciturne, avait épousé le comte de Hanau. Le duc de Bouillon alla lui faire visite à Hanau. De cette ville, il annonce à sa femme que « le prince Maurice doit lui envoyer quelqu’un pour lui offrir ses bons offices (15 mars). Il parle de Sedan. « Sedan est bien, je puis y aller et seul et accompagné ; et refuse diverses assistances que la continuation du mauvais traitement me tirerait hors de blasme d’en user. » On le voit pourtant préoccupé du voyage du roi à Metz, où était alors d’Épernon. Le duc de Bouillon envoie lettre sur lettre à sa femme ; il s’y félicite des assistances qui lui viennent de toutes parts. La duchesse avait accouché en son absence d’un enfant qui mourut presque tout de suite. Il la console,

  1. Elle devint duchesse de Landsperg.