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Aujourd’hui ce doute s’est dissipé; les auteurs des submersions ont repris courage et ne regrettent pas les fortes avances qu’ils ont faites pour l’installation mécanique de leurs appareils élévateurs des eaux. Il est vrai que chez M. Faucon lui-même l’opération a dû se répéter chaque année, à cause du retour inévitable de l’ennemi sur quelque point faible du vignoble : recrudescence de mal que M. Balbiani attribue avec raison peut-être à la puissance qu’auraient les œufs de phylloxéras d’échapper à l’asphyxie, doués qu’ils seraient de la propriété singulière de respirer l’air dissous dans l’eau, se faisant ainsi par accident une vie à peu près aquatique. Cette obligation de revenir tous les ans et durant un mois d’automne à la submersion totale des vignes, la nécessité de remplacer par des engrais les sels solubles que le lavage des terres entraîne, la cherté de l’installation première, qui suppose de grands domaines et des capitaux d’avance, voilà les inconvéniens graves d’un procédé d’ailleurs justement recommandé quand les circonstances s’y prêtent. Pour celui-là du reste, comme pour tous, la question économique veut être soigneusement posée, avant de se lancer dans des dépenses qui pourraient ne pas trouver une rémunération convenable. Le plus grand service à attendre de la submersion sera de provoquer la création du canal Dumont, qui, prenant les eaux du Rhône à Condrieu, fertiliserait une partie de la Drôme, de Vaucluse, du Gard et de l’Hérault, apportant à ces régions brûlées l’élément vital qui leur manque pour développer toute leur richesse agricole.

Les insecticides proprement dits agissant par leurs propriétés corrosives ou toxiques sur l’insecte, sont en quelque sorte innombrables. On n’a que l’embarras de les choisir, mais surtout l’embarras de les appliquer. Solides et même solubles dans l’eau, rien n’est difficile comme de les faire parvenir au contact de l’insecte qu’il faut atteindre : liquides, ils se répandent à grand’peine dans les sols compactes; le prix souvent très élevé de l’emploi s’ajoute à la valeur souvent trop forte de l’achat. On a beau faire d’ailleurs, c’est un problème presque insoluble que d’arriver même avec des flots de liquide à baigner les millions d’animalcules disséminés sur le vaste système radiculaire du même cep. Trois ans au moins, j’ai poursuivi le mirage de ces succès toujours incomplets et par cela même insuffisans. Acide phénique, huile de cade, eaux ammoniacales de gaz, sels d’arsenic, de cuivre; polysulfures alcalins, décoctions végétales variées, tout a semblé toucher le but, tout a fini par des déceptions. Enfin les émanations gazeuses sont entrées enjeu, et dès ce jour on a pu saisir l’espoir d’une réussite finale, dont chaque perfectionnement d’application est un gage et comme un avant-coureur.