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de 96 officiers et de 3,400 hommes, celui de l’artillerie navale côtière comprendrait 46 officiers et 2,146 hommes. Tout en faisant à l’opinion des concessions apparentes, M. Von Platen ne se pressait pas de demander à la diète les fonds nécessaires pour les appliquer, et il exprimait la pensée que « les changemens journaliers survenant dans l’art de construire rendaient impossible la détermination immédiate des différentes espèces de bâtimens à classer dans les deux armes, » mais il avait soin de désigner ceux de l’artillerie côtière.

L’année suivante, en 1866, le Times annonçait la construction en Suède de trois monitors cuirassés : Ericsson, Thordœn et Tirfing. Les deux premiers étaient à flot, le troisième était encore en chantier dans les ateliers de Motala, à Norrkoping, voisins de Stockholm. Le dernier avait été dessiné par M. Ericsson. Le chantier de Motala avait en outre des canonnières sur la forme. Dès 1867, ces monitors avaient pris rang dans la flotte, qui comptait en outre dix chaloupes canonnières. L’armement des monitors était de deux canons. On connaît l’excellence des produits métallurgiques sortant des fonderies de la Suède. Celle de Finspong a fourni des canons à la Russie, à la Prusse, à l’Italie, à la Belgique, au Danemark. Tous les pays empruntent à la Suède des plaques métalliques pour leurs navires cuirassés.

Quant à la flotte animée, aux remparts de muscles et de chair, aux cuirasses de courage, nulle part on ne les trouve plus abondans que dans ce pays. Pour punir le Danemark de sa fidélité à la France trahie par le gouvernement suédois, les coalisés de 1815, devançant et ratifiant l’iniquité future de la Prusse dans l’affaire du Slesvig, ont fait présent de la Norvège, autrefois danoise, au roi Bernadotte, quoique celui-ci n’y eût d’autre titre que son parricide politique. Le cadeau de la Norvège fut vraiment un cadeau royal, inappréciable surtout pour la marine du royaume. Plus de 100,000 habitans de ce pays sont adonnés à la pêche. En Suède, le nombre des marins qui pourraient servir sur la flotte n’est que de 40,000. Quand la monarchie suédoise a reçu la Norvège, elle a donc vu s’accroître de 100,000 hommes la pépinière de ses marins. Et quels marins ! disait le Journal officiel, à qui nous empruntons ces chiffres, — nul bâtiment flottant sur les mers ne porte des hommes plus fermes, plus hardis, plus prudens et « plus matelots » que les marins de la Suède et de la Norvège : recrues de l’avenir, bien précieuses et bien enviables pour les marines de Prusse... ou de Russie.

En Suède, ainsi que nous l’avons dit, ces ressources ne sont pas utilisées, et des 140,000 hommes dont le pays pourrait disposer, 10,000 à peine sont employés sur la flotte ou plutôt sur les flottes,