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viennent renforcer chez quelques-uns cette disposition d’esprit : plus d’un professeur qui supporte philosophiquement la concurrence lointaine d’une université libre, sent par avance qu’il ne prendra pas si aisément son parti de la concurrence, sous le même toit, d’un collègue et d’un émule. Il n’est pas à présumer qu’on rencontre d’opposition dans nos facultés aussi longtemps qu’il s’agira d’en augmenter les ressources matérielles, d’en doter les bibliothèques, d’en étendre les laboratoires; mais il est à craindre qu’on ne vienne se heurter à leur résistance quand on voudra faciliter l’accès des chaires, et quand on essaiera d’établir un système où les revenus du maître croîtraient en proportion de l’effort consacré par lui à ses leçons.

Ce n’est pas seulement chez les maîtres qu’une organisation nouvelle trouvera des habitudes à modifier. Les étudians se sont fait de l’enseignement supérieur une idée particulière. Ils y voient moins un moyen d’acquérir des connaissances qu’un acheminement vers une carrière. Comment en serait-il autrement? Ils viennent du lycée, où on leur a dit qu’avec la rhétorique et la philosophie les études générales sont closes. Parmi leurs camarades, ils voient les uns entrer dans les écoles spéciales, les autres passer de plain-pied dans des administrations où le certificat de bachelier est regardé comme une garantie suffisante de savoir. Ils se vouent donc à la préparation de leur état sans beaucoup chercher autour d’eux les occasions d’étendre leur horizon, ou de développer les connaissances acquises au lycée. Encore parlons-nous des meilleurs; mais un grand nombre semble croire que l’enseignement supérieur consiste dans le versement trimestriel d’une somme d’argent et dans un effort de mémoire à la veille des examens, opinion où ils sont fortifiés par le manque de contrôle, ainsi que par les dispenses de présence que l’administration leur délivre sans peine, dès qu’ils font valoir une apparence de motif. Ce n’est pas assez dire : nous verrons que dans les sciences et dans les lettres l’absence est exigée par l’état.

Chez les élèves comme chez les maîtres, il y aura donc des habitudes et des idées à rectifier. Ce sont là les difficultés; voyons maintenant à quelles conditions une réforme est possible.


II.

La première condition est ce qu’on est convenu d’appeler le groupement des facultés. Pour comprendre ce terme, un mot d’explication est nécessaire.

En vertu d’une ancienne habitude, nous parlons des quatre facultés,