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fête, bien serré sur les hanches par une bande d’étoffe de couleur nommé tapis, un canezou d’un tissu transparent et largement échancré sur les épaules, constituent leur costume. Elles n’usent pas de bas, de même que les femmes métisses qui se distinguent des Indiennes en ce qu’elles ne portent pas de tapis autour des hanches. Toutes traînent des mules de velours noir brodées ou couvertes de paillettes d’or; comme cette chaussure est très découverte, pour l’assujettir elles la saisissent entre les deux derniers doigts du pied, le plus petit en dehors. Un scapulaire plus ou moins riche est suspendu à leur cou, et leurs mahas sont surchargées de bagues.

Les femmes tagales sont admirables de forme; leurs seins, que n’emprisonne jamais un corset et qu’elles laissent parfaitement voir sous une gaze transparente, sont fermes et puissans. Malheureusement, chez les deux sexes, la peau, qui est fort douce, porte des taches singulières, imitant la forme des îles et des continens de nos cartes géographiques ; ces empreintes sont blanches ou couleur de café au lait. Il faut en chercher la cause dans un vice du sang, appauvri par une nourriture trop peu substantielle ou composée principalement de poisson. Les hommes sont bien moins robustes que les femmes, probablement parce que ces dernières travaillent beaucoup plus que le sexe prétendu fort. Pendant que le mari, accroupi ou les genoux ployés, joue avec son coq de combat et fume nonchalamment la cigarette, on voit la femme et les enfans conduisant les buffles au labour, faucher ou broyer le riz dans le luçon antique, ou travailler du matin jusqu’au soir à la fabrication des cigares.

L’Indien a cependant une grande passion pour sa compagne, et pour plaire à la femme qu’il aime, il ira jusqu’à la servitude et au crime. Il se condamne volontiers, pour obtenir ses faveurs, à devenir, comme Jacob chez Laban, le domestique des grands parens pendant plusieurs années. On a remarqué que les jeunes filles avaient une prédilection marquée pour tout indigène qui vivait hors la loi, faisant partie de ces bandes de maraudeurs nommés tulisanes, qui, le visage noirci, attaquent nuitamment les haciendas isolées et les pillent. J’ai connu une de ces femmes romanesques : à cheval, vêtue d’une robe flottante, la tête couverte d’un large chapeau de paille, et la guitare en sautoir, l’aventureuse Indienne suivait son amant dans ses périlleuses expéditions. On en a vu combattre et mourir à côté de leurs héros; mais c’est l’exception. Ajoutons que, dès que les Indiennes sont mariées, — et elles se marient à dix ou douze ans, — elles perdent rapidement tous leurs attraits ; à vingt ou vingt-cinq ans, elles sont déjà flétries, et à Quarante ans commence la décrépitude. Dans leur vieillesse, elles ont encore pourtant