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dans la Meurthe, un près de Sarrelouis ; en tout vingt-neuf en France, comprenant plus de 1,350 pièces. Ces trésors se composent uniquement d’objets neufs, n’ayant jamais servi, quelquefois attachés plusieurs ensemble et tirés du même moule à plusieurs exemplaires. On les rencontre dans de petites cavités creusées exprès, où leurs possesseurs paraissent les avoir cachés pour peu de temps. Le plus souvent ces trésors, ceux des Alpes du moins, se trouvent dans des lieux élevés, non loin de passages fréquentés par les voyageurs passant d’un pays dans un autre. Rien dans le voisinage n’indique soit une fonderie, soit une station quelconque, les lieux d’où on les a rapportés sont des déserts[1]. Peut-on voir dans ces dépôts momentanés autre chose que des assortimens pour le négoce ? N’ont-ils pas été placés dans ces cachettes par les mêmes hommes qui, dans les vallées, refondaient les produits détériorés de leur industrie ? Si tout nous porte à croire que telle est bien l’origine des trésors, il ne resterait plus qu’à déterminer le sens où marchaient ces ouvriers pour savoir s’ils allaient, par exemple, de France en Italie ou d’Italie en France. On verra tout à l’heure que ce difficile problème n’est peut-être plus insoluble aujourd’hui.


IV

Nous devons maintenant parler des industries de l’âge du bronze dont les gisemens comparés entre eux ont révélé l’existence, la nature, les procédés et les époques relatives. Parmi elles, il y en avait d’indigènes. Certainement les hommes de ces temps anciens se construisaient eux-mêmes leurs demeures, qui furent de bois à partir de l’époque où ils quittèrent les cavernes. Celles qu’ils élevèrent sur la terre ferme ont disparu sans laisser de traces ; mais si les maisons des lacs ont été détruites, il nous est du moins resté les pilotis sur lesquels elles étaient édifiées. Ceux des époques antérieures au métal étaient plus près de la rive et moins saillans au fond des eaux. Les autres furent établis au-delà des premiers et ont en Savoie une plus forte saillie à laquelle on peut aisément les reconnaître. Les pièces de bois qui reposaient sur les pilotis et formaient le plancher du fond étaient assemblées avec eux par des tenons et des mortaises ; ainsi donc les haches et les ciseaux de pierre

  1. Le trésor de Réallon, qui est maintenant au musée de Saint-Germain, fut trouvé près de ce village, non loin d’Embrun, à 1,080 mètres d’altitude. Le col est à 2,519 mètres. « Ce passage, très anciennement fréquenté par les piétons, conduit de Saint-Bonnet à Embrun, par Orcières. » Le trésor de Beaurière fut trouvé par un cultivateur ; ce village, de l’arrondissement de Dio, est situé sur un ancien passage de montagnes, au col de la Cabre, sur la route de Luc. Beaucoup d’autres trésors avaient été déposés dans les parties supérieures des rivières, quelques-uns aussi dans la plaine.